Promis un jour je saurai le faire, te dire ô combien sans taire entre père & fils
ft. charle
Le Samedi 1er Janvier 1966,
Père,
Je ne sais par où commencer. Il y a tant de choses à dire. Des choses que nous avons tues trop longtemps, que nous avons laissé grandir dans un silence malsain qui nous a précipité dans notre situation actuelle. Peut-être vous assurer tout d'abord de ma culpabilité. Il n'y a pas un seul jour qui passe sans que je ne pense à vous. Je ne vous promets pas, néanmoins, que ce soit toujours des pensées positives ; la rancœur reste forte, mais le manque gagne du terrain. Je ne saurai vous expliquer clairement les raisons mon départ. C'était une pulsion, un besoin vital. L'envie de vivre enfin pour moi, de quitter ce carcan de règles et de hontes que vous avez tissé autour de moi tout au long de ma jeunesse. J'étouffais ; j'ai attendu ce jour avec impatience, mais aussi avec avec beaucoup d'incertitude… Ça a été difficile de tenir jusque-là. Jusqu'à cette nuit fatidique où, emportant toutes les affaires auxquelles je tenais, je me suis glissé hors du manoir dans le froid glacial de la nuit. Je n'étais pas fier. Ne pensez pas à une simple révolte. Voyez cela comme le remède essentiel à ma guérison. Sans ça, je ne sais pas si je serais encore là aujourd'hui pour vous écrire cette lettre.
Je vous ai longtemps haï. J'ai vécu des choses difficiles que vous ne saurez imaginer, et que je ne vous conterai pas. Je suis en vie, et c'est bien là le principal. En vie, avec un toit au-dessus de ma tête, un colocataire, un travail. Sans doute pas celui auquel vous me destiniez, et j'en suis navré. Les sources de cette haine tenace sont comme des lacs souterrains que seul le temps parviendra à dissoudre. Je pense que nous ne nous sommes jamais vraiment compris. Avons-nous essayé de nous comprendre ? Il y a eu une fracture ; un fossé s'est creusé. Je n'ai jamais été le fils que vous désirez. Je le sais ; je l'ai senti. Trop sensible. Trop faible, pas assez digne. La dignité n'est pas une de mes plus grandes qualités, c'est vrai. Je n'ai pas votre noblesse – peut-être suis-je misérable –. Vous n'aimez pas mes manières. Vous détestez ces larmes qui ont tant de fois marqué mes joues. Et lorsque la souffrance s'est manifestée autrement, vous avez fermé les yeux. Surtout écrasé par la honte et l'incompréhension. Pourquoi se blesser volontairement quand on a dix-sept ans ? N'avais-je pas tout ce que je voulais ? D'autres auraient rêvé de ma place. J'en ai conscience ; c'est un trouble profond qui vous a laissé perplexe. Mon grand-père – votre père – disait que l'ignorance était un silence douloureux. Nous nous sommes ignorés l'un l'autre. Nous avons projeté nos désirs en effaçant nos caractéristiques propres. Mais le fait est, Père, que je ne pourrais jamais me conformer à vos souhaits. Dieu sait pourtant que j'ai essayé. J'ai lutté pour devenir un homme aussi fort et droit que vous le souhaitiez. J'ai échoué, et cette défaite a été terriblement douloureuse.
Le jour où je me suis confié à vous a été le pire de ma vie. La honte m'a marqué au fer rouge, et j'aurais préféré mourir qu'avoir à subir ce chagrin cuisant qui s'est dès lors emparé de mon cœur. J'ai fait l'erreur de penser que vous entendriez ma différence ; que vous l'accepteriez. Un faux-pas que j'aurais dû prévoir, mais dans mon extrême naïveté, j'ai cru bien faire. Peut-être aurait-il été mieux que je garde le silence… Mais jusqu'où la supercherie nous aurait-elle menés ? Je vous le demande. Je ne me marierai pas. Je suis votre seul héritier ; j'en ai conscience. Mais accepter cette union reviendrait à inscrire mon nom sur le caveau familial. Est-ce vraiment ce que vous voulez ? Désirez-vous avoir la mort de votre fils sur la conscience ? Je sais pertinemment que je ne présente plus aucun intérêt pour vous. Mais ne gâchez pas le peu de bonheur que je pourrai saisir à l'avenir. J'aime les hommes. C'est cette vérité qui a jeté un froid définitif sur notre relation déjà voilée de fêlures. Je n'ai pas choisi d'être différent. Pourquoi aurais-je fait cela ? Si j'avais préféré les femmes, je serais encore au chaud chez nous ; j'aurais peut-être eu des amis ; j'aurais accepté le plus beau des partis, et je rêverais d'enfants. Vous seriez fier de moi. Comme j'aimerais que vous soyez fier de moi… Aujourd'hui, je suis confronté à la solitude. Je rêve au prince charmant comme vous avez un jour rêvé à une jolie dame. Je ne suis pas désespéré. Je lutterai pour prouver au monde entier que cet amour est vrai. Qu'il est possible. Je lutterai pour vous faire comprendre que je ne suis pas malade. Qui si je suis instable, cela ne tient pas à mon indifférence pour la gente féminine. Il ne devrait pas y avoir de polémique autour d'une question aussi banale. Je suis ce que je suis. J'aime ce que j'aime. Souhaitez-moi seulement de rencontrer la bonne personne ; d'être heureux avec elle, et ce, jusqu'à la fin de mes jours. Je ne reprendrai pas votre banque. La finance ne m'a jamais intéressé. Je suis un rat de bibliothèque ; les chiffres ne me parlent pas. Je rêve d'évasion, d'aventure et de carrière littéraire. J'aime l'odeur du papier et de l'encre, malgré tout le mépris dont vous avez fait preuve à ce sujet. Si vous aviez accepté de lire mon premier roman, peut-être auriez-vous compris les pensées qui me hantent. Mais les romans sont futiles ; c'est vous qui l'avez dit.
Mais je ne suis pas ici pour rendre des comptes, sans mauvaise transition. Non ; je ne vous accuse pas. J'essaie juste de vous expliquer pourquoi nous en sommes arrivés là. Les raisons de notre discorde, les origines de mon mal-être… Je suis un homme fragile, qui a besoin de soutien et d'affection pour avancer. Mes angoisses, la mélancolie, les idées noires me collent à la peau depuis que je suis enfant. Vous le savez, vous l'avez vu, vous avez fui. Je ne vous en veux pas : c'est une situation difficile, que peu parviennent à comprendre et à supporter. Je trouverai la bonne personne pour ça, je l'espère. Quelqu'un qui m'accepte comme je suis, sans se plaindre de ces changements d'humeurs qui m'handicapent au quotidien. En attendant, ne vous inquiétez pas : j'ai eu le courage de visiter un spécialiste qui m'aide à avancer et me motive pour apprendre à guérir. N'est-ce pas le principal ?
En réalité, il ne manque plus qu'une pièce au puzzle, et c'est vous. J'aime espérer que vous accepterez de faire table rase, d'ouvrir votre cœur à ce fils que vous avez toujours voulu modeler à votre image. Vous n'y parviendrez pas, soyez-en sûr. Aussi, si vous reprenez contact avec moi dans ce but, passez votre chemin. C'est douloureux d'écrire une telle chose, mais je n'accepterai pas d'être de nouveau confronté à vos exigences. Si nous nous donnons une nouvelle chance, c'est en faisant des efforts. Des deux côtés. Mais il y a des choses que je ne pourrai changer, même avec toute ma bonne volonté. On n'altère pas aussi facilement sa nature profonde, à moins de se mentir ; mais je ne veux plus nier la personne que je suis aujourd'hui, et que j'étais hier, sans le savoir.
Si cette lettre vous est adressée, que le reste de la famille ne pense pas que je l'oublie. J'embrasse tendrement Mère et mes sœurs. J'espère que ma disparition ne leur a pas donné trop d'inquiétude… J'en doute, bien heureusement.
J'attendrai votre réponse le temps qu'il faudra. Je me montrerai patient.
Je ne compterais pas le nombre de lettres, en ébauche à celle-ci, qui ont finit leurs jours dans les flammes de la cheminée. Tant de choses à dire qui ne se disent pas, des mots à changer, car ils ne conviennent pas, de phrases que l'on doute à coucher sur le papier et que l'on finit par rayées...
Ton départ a été soudain. Je t'avoue l'avoir pris d'abord pour une rébellion, un caprice d'enfant, avant de comprendre la dureté de ce geste quand tu ne revenais pas. Nous avons d'abord pensé qu'il t'était arrivé malheur, mais cela ne nous a pas empêcher de remuer ciel et terre pour tenter de te retrouver. Crois bien qu'il n'y a pas un jour où j'observais, inquiet, la chronique nécrologique ou que je téléphonais pour avoir des nouvelles sur les enquêtes lancés, d'abord par les forces de l'ordres, puis par les détectives privés. Cette lettre que tu m'as envoyée fut alors d'un certain côté une délivrance.
C'est douloureux d'entendre à quel point tu as pu me haïr, tout comme cela m'est difficile de te l'écrire. Tu sais sans doute mieux que quiconque que mon éducation m'empêche de sortir ce genre de propos qui me parait si faible. Cette même éducation que j'ai tenté, en vain, de te donner. Je n'ai jamais compris pourquoi elle ne fonctionnait pas sur toi alors qu'elle avait forgé tous les hommes de nôtre famille, de génération en génération. J'ai souvent pensé que je m'y prenais mal, que j'aurais dû user davantage du martinet ou te prendre plus souvent avec moi à la banque pour t'éviter toute distraction, mais une partie de moi me disait que cela aurait pu être pire. Certes, je voulais faire de toi un homme, comme moi, mieux que moi, mais ne crois pas que cela allait jusque dans le besoin de t'en blésser. Bien au contraire, j'espérais te donner une vie qui t'aurais protéger de tout.
À te lire, je comprends que cela n'a pas été le cas et j'en suis navré. Tes mots sont proches de la vérité. Je ne comprenais pas tes besoins et tes actions. À dire vrai, je ne les comprends toujours pas ou peu bien que j'essai. Moins je les comprenais, plus j'avais cette horrible sensation que tu en faisais exprès comme si ton but était de détruire en morceau le moindre de mes espoirs pour toi. Ta déclaration, après les coups que tu avais reçus pour ce garçon, n'en était pas loin... Après cela, qu'aurais-tu pu faire de plus ? Bien des scénarios immondes m'ont traversé l'esprit. À partir de ce moment, loin de chercher de faire de toi un homme, j'essayais plutôt d'éviter que tu ne t'enfonces encore plus.
Je comprends, à ta lettre, que sur cela aussi, je me suis trompé. Je ne peux pas te dire que j'accepte ce genre de relation. L'homme, pour moi, est lié à la femme. Il ne peut y avoir nulle famille, nul amour, nul enfant si l'un des deux manques. Cependant que cela me gêne ou non, je ne peux pas te laisser disparaître pour cela. Tu es mon fils, Alexandre, et cette main que tu me tends, par cette lettre, je me refuse à l'ignorer. Nous avons déjà tous bien trop souffert de cette année sans ta présence. La maison était peut-être un enfer pour toi, mais pour nous, cela a commencé à ta fuite. Je ne saurais parler pour tes sœurs, mais en ce qui concerne ta mère, sache que ces sourires ont été, depuis, difficile à trouver. Elle ne pourra malheureusement pas lire de tes nouvelles pour l'instant : avec tes soeurs, elle est en vacance à Alola. J'espérais que la chaleur qu'elles y trouveront ferait oublier la glace qu'a instaurer ton départ. C'est donc seul, dans le salon silencieux du manoir, que je te réponds ces quelques mots.
Tu dis avoir un toit, un travail, un colocataire... Cela me rassure. Y es-tu au chaud ? À l'abri du vent ? Avec du mobilier décent ? De quoi te nourrir de façon saine et équilibrée ? Ton patron, te traite-t-il convenablement ? Te paye-t-il bien celons les normes ? Et ton colocataire ? Ne soit pas déçus si je préfère que tu évites de trop me donner de détails sur ta relation avec celui-ci s'il est plus qu'un colocataire. Ou toute autre personne avec qui tu es en relation plus poussé. Néanmoins, si tu es bien de ce point de vue... Alors c'est bien.
C'est sûrement trop tôt pour cela, j'en conviens, mais sache que cela ferrait plaisir à ton père de te revoir même si ce n'est que pour un thé dans un endroit neutre. Tu es toujours le bienvenu, que cela soit au manoir, à notre appartement ou même à la banque. J'ai observé que c'est une adresse d'un magasin que tu as mis le "Drain Kiss"... Est-ce celui où tu travail ?... Je n'ai pas réussi à avoir de retour dessus jusqu'à maintenant, peut-être est-il récent.
T'écrire cette lettre, étrangement, une fois arrivé à cette fin, me soulage. En a-t-il été de même pour toi ? J'aimerais beaucoup que nous continuons cet échange et en apprendre plus sur celui que tu es devenu... Et même celui que tu étais et que je n'ai pas vu.
Cordialement, Charle Henri William de Montgommery, Duc de Duilleag.
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Mer 13 Jan - 1:34
Promis un jour je saurai le faire, te dire ô combien sans taire entre père & fils
ft. charle
Le Lundi 16 Janvier 1966,
Mon cher père,
J'ai mis tant de temps à ouvrir cette lettre. Elle m'a causé autant d'effroi que de soulagement. Et, au terme d'un doute persistant, d'une peur cruelle, j'ai fini par briser le cachet de cire à l'effigie de votre maison. Je ne sais comment exprimer ma gratitude ; bien sûr, j'ai conscience que cet échange ne constitue que le début d'un long cheminement tortueux. Mais le premier pas a été fait, et nous savons bien qu'il est l'étape la plus difficile. Désormais, nous nous devons d'avancer lentement mais sûrement, vers la compréhension de l'autre, et par conséquent, la compréhension de soi. Je ne suis pas bien différent de vous, Père. Je pense même vous ressembler en bien des aspects, et cette constatation me sidère autant qu'elle me rend fier. J'aimerais, à l'avenir, que seule la fierté subsiste, car c'est le plus beau sentiment que j'ai à éprouver. Je veux me sentir votre fils, de nouveau, pour de bon. Ne plus avoir à vous nier, à vous détester comme j'ai pu le faire. Et, par conséquent, ne plus jamais me sentir seul, livré à moi-même, comme ça a été le cas.
Je dois avouer avoir été particulièrement touché par vos mots. Je ne soupçonnais pas une seule seconde que mon départ ait pu vous causer un si grand chagrin et une inquiétude aussi insoutenable. Pour cela, je vous demande pardon, cent fois. Mille, s'il le faut. Pardonnez-moi. Je n'avais plus d'autre alternative. Quand la mort devient une idée fixe, il faut savoir prendre la fuite, sauver sa peau tant qu'il en est encore temps. Je sais les tourments que je vous cause ; je sais qu'accepter la personne que je suis – et que je resterai – sera chose difficile pour vous. Père, je connais vos valeurs, vos grandes vertus, mais je sais aussi vos défauts. Et croyez-moi, s'ils sont rares, ils prennent parfois beaucoup de place. Je me doute donc que fermer les yeux sur ce pan de ma vie privée sera dans un premier temps tout ce que vous parviendrez à faire, et sachez que je vous en serai déjà infiniment reconnaissant. Après tout, quel besoin de nous connaître de façon aussi intime ? Vous me voyez tel que je suis, de l'extérieur. Mon quotidien, la personne avec laquelle je partage ma vie et mon lit – si un jour elle vient à exister –, ne vous concerne guère. Ne nous attardons donc pas sur ce point, qui, il fut un temps, m'attristait autant que vous. Aujourd'hui, je sais la personne que je suis, je sais que rien ne pourra y changer. Et, si par malheur, les signes extérieurs que vous m'avez tant de fois reprochés, viennent de nouveau à vous troubler, je dois bien avouer que je serais bien en mal de les réfréner… Pardonnez-moi pour cela. Sachez seulement que ce n'est en aucun cas une provocation.
Du reste, vos erreurs, vos illusions, vos espérances vaines… Je les oublie. Ou du moins, je vais tenter de faire tabula rasa. Table rase pour recommencer tout à zéro, repartir sur des bases saines… Entretenir une rancœur aussi profonde, inutile et enracinée ne nous aiderait en rien. Vous êtes humain, comme je le suis, et tout le monde peut faire un faux-pas, aussi terrible soit-il. Je sais que je n'ai pas été un enfant facile ; je sais que je vous ai donné beaucoup de sang d'encre… Alors passons, s'il-vous-plaît, si vous en êtes capables. Tirons un trait sur ces éléments du passé qui nous font souffrir tout les deux et nous empêchent d'avancer, côte à côte.
Je tiens à vous, Père. N'en doutez pas. Je tiens à vous comme vous tenez à moi. Peu importe nos divergences, la distance qui a pu s'établir entre nous, vous restez mon père et je demeurerai à tout jamais votre fils. On ne peut ignorer un père, en bien comme en mal. Je veux être attaché à vous par du positif.
Et, en ce qui concerne vos dernières inquiétudes, sachez que ma situation est stable. Ce n'est certes pas la meilleure situation qui puisse exister, mais elle est tout à fait tolérable. Mon patron est un homme particulier, auquel il me tarde un jour d'exposer ma démission en bonne et due forme… Cependant, je le vois peu pendant mon service, et je travaille surtout auprès de mes collègues, notamment mon colocataire qui est un garçon tout à fait charmant avec lequel je n'entretiens que des liens purement amicaux. Vous savez, je ne suis pas facile à vivre avec mes changements d'humeur… C'est un garçon patient et d'une bonté sans limite, malgré quelques élans bougons. Je lui dois beaucoup. Ne craignez rien. Je suis bien entouré. J'ai adopté quelques Pokémon aussi, qui me tiennent compagnie et m'apportent un peu de chaleur. Tout va pour le mieux, dans le meilleur des mondes. C'est ce que nous dirons pour l'instant. Quand au Drain Kiss, je préfère vous demander de ne pas trop enquêter à son sujet. Découvrir mon lieu de travail sans que je puisse vous en expliquer les tenants et les aboutissants ne fera que vous inquiéter et vous décevoir… Je vous envoie donc cette lettre depuis mon logement ; l'adresse figurera sur l'enveloppe. Adressez vos prochains envois à cette dernière : je vous en serai infiniment reconnaissant.
S'il-vous-plaît, n'essayez pas de me retrouver. Continuons cet échange qui nous fait du bien à tout les deux, encore un temps… Et lorsque nous jugerons bon de nous revoir, fixons un rendez-vous dans un café de Bronswick. En attendant, sachez que vous écrire cette lettre me comble d'un bonheur que je n'ai plus ressenti depuis bien longtemps. J'attends vos demandes et vos interrogations ; je ne saurai dire par où je dois commencer pour satisfaire votre curiosité… Ma vie présente et passée me semble bien trop floue pour je parvienne à vous en faire un récapitulatif intéressant et complet… Posez-moi vos questions, dissipez vos doutes, demandez-moi d'éclaircir certains points… Tout sera plus facile de cette façon. Quant à vous, je serai aussi ravi d'avoir de vos nouvelles, de celles de Mères et de mes sœurs si vous en avez, de la vie à Duilleag, qui me manque terriblement.
Je n'ai jamais eu aucun souci pour écrire mes lettres, posant sur les papiers mes pensées, telles qu'elles, conscients des possibles conséquences de mes choix de mots, mais en sachant que je peux rabattre, facilement, ceux qui en seraient outrés. Les tiennes me prennent plus de temps. Plus de réflexion. Plus de papier et d'encre. Je n'ai guère envie de perdre tes courriers pour un mot mal interprété. Pour autant, je ne peux non plus devenir une personne que je ne suis pas, je te serais donc grès de ne pas prendre mal certaine de mes phrases que j'essaye, pour maintenir ce lien, de ne pas rendre offensive, cruelle, ou mauvaise. Ce n'est pas mon but de te froisser.
Bien que j'essai de me mettre en partie à ta place, il y a encore bien des choses qui me font grimacer. Une chose surtout que je n'ai pas besoin de cité, je suppose. Déjà, quand tu étais plus jeune, cela m'était très difficile de te voir rejeter le bonheur qu'une femme peut t'apporter. Je sais, désormais, que cela est vain d'espérer, pour toi, une vie de famille, la joie de devenir un mari, puis un père. Quand j'imagine ton futur, je n'arrive qu'à te voir, malheureux, hué par les autres pour ton choix de vie, obliger de te cacher pour rejoindre ton amant, voir disparaître au petit jour pour cacher à sa propre famille ce qu'il est. Ces perspectives ne me plaisent guère pour toi. Néanmoins, je le sais bien, cette partie de ta vie, désormais, est tienne et je ne peux, en tant que père, qu'être là pour te soutenir malgré tout même si pour cela, je dois serrer les poings et les dents en silence.Peut-être qu'un jour tu me montrera que je me suis trompé, qu'il y à d'autre solution plus heureuses. Je l'espère sincèrement, mais j'y crois si peu. Espérons que tu sauras me prouver que j'ai tords.
J'aurais aimé t'écrire que je suis fière, mon fils. Comme tu me l'as noté, mais se serais construire de nouveau sur des bases de mensonges. Je te mentirais si je ne te disais pas que j'ai bien plus d'inquiétude, toujours, que de fierté. Pour autant, je te sais capable de beaucoup, de grande chose même, mais aussi des pires. Tout comme j'espère te voir, un jour, heureux, je souhaite aussi un jour pouvoir sourire, te passer la main dans les cheveux et être rempli de fierté. Celle de savoir que malgré toute ces embûches, tous ces problèmes, tous ces soucis, tu as su te relever, avancer, grandir et t'épanouir. Être en soit l'homme que j'espérais que tu sois. Peut-être pas, en effet, celui qui reprendrait la banque et fonderait une famille magnifique et aimante, mais celui qui aura sut prendre sa vie en main pour la modeler à ces envies. Même si ces envies ne me plaisent pas tous...
Tes efforts ne sont pas vains mon fils. Si cela m'apaise que tu vois les miens, sache qu'il en est de même de mon côté. Je vois à travers tes mots, tes lignes, cette main tendue, mais blessé, tes colères, tes craintes, tes pleurs. Malgré la table rase, nous verront toujours ce qu'on a pu mettre à terre avec ces années. Nous n'oublierons pas, mais nous pouvons essayer de rendre la suite meilleure. Je l'espère en tout cas, pour toi, pour moi, mais aussi pour toute la famille.
Ta demande de ne pas me renseigner arrive un peu trop part. Les rumeurs que j'ai entendues sur le Drain Kiss ne m'enchantent guère. Encore moins quand tu me dis que tu as hâte de poser ta démission a ton patron. Rappel toi qu'il y a des lois, même pour ce genre d'endroits alors en cas de besoin, n'hésites pas à contacter un avocat ou un policier. Si menace il y a, peu importe la nature, ne te laisse pas faire. Peu importe tes préférences, nul personne n'a le droit d'en profiter d'une manière ou d'une autre. Défends-toi mon fils et ne crains pas les représailles ou les conséquences. Au besoin, je serais derrière toi. Ton père a des défauts, oui, mais jamais il ne laissera quelqu'un faire du mal à sa famille. Tu es de la famille, Alexandre, et tu le seras toujours.
Je respecterais ton choix, pour ton adresse et l'attente avant de nous voir. Te savoir entouré de Pokémon et de personnes conciliantes, me rassure. Il faut être entouré pour réussir, même si cela ne veut pas dire pour autant faire confiance à n'importe qui. Fait toujours attention, mon fils, et ne donne pas ta confiance trop facilement. Tu me demandes des questions plus précises, mais à vrai dire, je ne sais guère comment te les poser. Je pense que simplement te lire, déjà, me fait un bien suffisant sans risquer de lever un Lapyro qui pourrait nous faire de nouveau tirer les couteaux. Je rentre peu au manoir : sans ta mère, tes sœurs et toi, il me semble bien trop triste, silencieux et vide. Les employés me renvoient le courrier à l'appartement quand je ne passe pas vérifier l'état de celui-ci. Je n'ai pas encore reçu la réponse de ta mère à ma dernière lettre, lui donnant de tes nouvelles, mais cela ne devrait plus tarder. Nulle doute que cela a dût la rassurer au plus haut point que de te savoir en vie.
J'attends ta réponse avec impatience.
Cordialement,
Charle Henri William de Montgommery, Duc de Duilleag.
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Dim 17 Jan - 20:04
Promis un jour je saurai le faire, te dire ô combien sans taire entre père & fils
ft. charle
[La lettre est froissée et par endroit, l'encre s'est dispersée dans des formes de gouttes. Le papier semble avoir été mouillé…]
Le Lundi 5 Février 1966,
Je ne pense pas que nous ayons beaucoup plus à nous dire. J’y ai cru, pourtant. J’ai vraiment pensé que vous aviez évolué sur la question ; que vous vous étiez repenti sur ce sujet délicat qui vous a toujours rendu exécrable. J’ai aujourd’hui vingt-trois ans. Imaginez-vous un seul instant qu’à vingt-trois ans, tout ce qu’on trouve à penser de vous, est que vous courrez à votre perte. Imaginez-vous une seule seconde la souffrance que m’infligent vos déclarations irrespectueuses et incisives. Je ne pourrai donc pas connaître le bonheur sans une femme et des enfants ? Rassurez-vous : après avoir passé une telle enfance, une telle adolescence, je n’aurais sans doute jamais désiré une descendance. Pourquoi faire ? Faire subir à ma progéniture ce que vous m’avez fait subir ? Réitérer les mêmes erreurs ? Les mêmes tortures ? Leur dire, à eux aussi, si par malheur ils venaient à aimer une personne de même sexe, qu’ils sont destinés à vivre dans la honte, la terreur et la solitude ? Prenez-vous conscience de l’impact de vos mots ? Chaque phrase a une incidence. Chaque pensée est un coup que vous me portez ou une caresse pour apaiser mes doutes et mes souffrances. Vous me faites mal. C’est tout ce dont vous êtes capables, visiblement, le tout en prétendant faire de grands et héroïques efforts. Je les attends toujours, ces efforts. Vous vous cachez pour mieux me découvrir et me punir par la suite. Je ne comprends pas comment j’ai pu me montrer assez naïf pour croire à une réconciliation. Comment ai-je pu boire vos paroles sans me douter de la noirceur qui vivait toujours derrière ? J’ai quitté pendant un an le foyer familial. Vous m’avez cru mort, vous m’avez cru perdu. N’avez-vous donc pas eu le temps de réfléchir à vos actes ? Êtes-vous donc de ces autres, incapables de se remettre en question ? Incapable de revenir sur vos actes passés ? Ne vous êtes-vous jamais posé des questions sur les raisons de mon départ ? N’avez-vous donc jamais interrogé votre bonne conscience ?
Votre orgueil me dégoûte. Orgueil et avarice. Gonflé de fierté pour tout le reste, mais incapable d’en accorder ne serait-ce qu’une once à votre fils. C’est vous qui devez avoir honte. Certainement pas moi. Moi, je n’aurai plus jamais honte de la personne que je suis. Et si cela vous pose problème, passez définitivement votre chemin. J’en ai assez de me rendre malade pour vos beaux yeux.
Ah, je ne vous rends pas fier ? Vous avez honte de moi ? Mon futur vous paraît compromis ? Eh bien, fermez les yeux et laissez-moi dans ma merde. De toute façon, ce n'est pas comme si ça allait changer quelque chose.
Vous serez sans doute plus heureux comme ça.
Je suis désolé, sincèrement, de ne pas être le fils dont vous auriez rêvé. Je ne peux rien pour vous. Vous ne pouvez rien pour moi.
Arrêtons les frais ici et maintenant. N'essayez pas de me retrouver. C'était une erreur.
Sans doute, ai-je mal choisi mes mots... Ceux-ci n'étaient pas envoyés pour te blesser. Excuse ma maladresse sur ces phrases qui devait te montrer mon inquiétude pour toi et non pas être irrespectueuses et incisives.
Penses-tu vraiment que j'ai passé cette année sans toi à seulement attendre ou espéré ton retour ? J'étais conscient, avant même ta lettre, que j'en étais responsable. Que je t'en demandais trop, trop souvent, pour satisfaire mes exigences et non tes besoins. J'ai été aveuglé par l'idée de t'offrir une vie comme j'ai eu le plaisir de connaître sans prendre en compte nos différences, refusant même que tu sois diffèrent. Peut-être parce que si j'acceptais que tu le sois, ce serait admettre que je ne peux pas te guider dans des chemins que j'ignore et à ce moment-là, je n'étais pas prêt pour l'accepter. Je me devais d'être celui qui montre la voie, celui qui sait ce qu'il va se passer, celui qu'on prend en modèle. Comment être le modèle de quelqu'un qui n'a rien en commun avec toi ? J'étais persuadé que mon seul moyen de t'aider, véritablement, était de te façonner pour être ma copie parfaite.
Je le sais, maintenant, que les choses ne se passent pas ainsi et que cet acharnement, au contraire, à été très néfaste pour toi. J'y ai pensé, pendant ton absence, et cela, à été confirmer dans tes lettres. Ne crois pas que j'ai honte de toi, mon fils, le mot ne convient pas. Mais il y a cet inconnu sur ton futur, sur cette voie que tu suis, qui m'angoisse. Je ne t'empêcherais pas d'être ce que tu es, ce que tu veux, ce que tu veux aimer non plus, j'en retiens bien assez les conséquences. Au contraire, j'aimerais, comme tout père, t'y accompagner si c'est là ou se trouve ton bonheur, mais comment ? Je l'ignore tellement...
Lis-tu cela Alexandre ?... Ton père dans l'ignorance... Dans l'incapacité de savoir quoi faire, comment faire, pour simplement être présent et te relever si tu tombe. Je ne sais pas si tu répondras à ces aveux, à cette lettre, à ces excuses mais sache, mon fils, que je souffre aussi de tout cela. Et ceux malgré mon orgueil, mon avarice et ma fierté.
[Il y a un long passage sans rien d'écrit, puis, finalement, à la fin de la lettre : ]
Alexandre, s'il te plaît, guide moi.
Cordialement,
Charle Henri William de Montgommery, Duc de Duilleag.
Invité
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Lun 25 Jan - 22:37
Promis un jour je saurai le faire, te dire ô combien sans taire entre père & fils
ft. charle
[L'écriture semble beaucoup plus adroite et posée. Elle est même assez sinueuse et jolie. La lettre est dans un parfait état ; presque comme si on avait fait attention de ne pas la froisser]
Le 26 Février 1966,
Père,
Je ne sais pas quoi penser de votre réponse. J'ai la sensation que nous ne nous comprendrons jamais vraiment. Il restera toujours un écart entre nous, aussi infime soit-il. Je comprends vos peurs, vos doutes néanmoins. Je pense m'être un peu emporté la dernière fois… Il y a des jours avec et des jours sans. C'était une période difficile… Mon moral fluctue beaucoup, mais cela aussi, j'essaierai de vous l'expliquer. Il faut que vous sachiez que vous n'êtes pas responsable de tout ce que vous pourriez penser être des "tares" et auxquelles je préfère la formule de "petits malheurs", car il ne faut jamais dire qu'ils sont grands pour espérer un jour s'en sortir. Je sais que, tout au long de mon enfance, vous pensiez faire de votre mieux… Ou du moins, j'ai cru le comprendre par la suite. Ça a été difficile, je dois bien l'avouer, mais en prenant de la distance, j'ai aussi appris à porter un autre regard sur tout ce que j'ai vécu, sur tout ce que nous avons vécu ensemble. Difficile néanmoins d'accepter vos incompréhensions, vos peurs, vos angoisses alors que moi-même je doute de mon avenir, même si ce n'est certainement pas pour la même chose.
J'entends donc votre détresse. Elle est la mienne aussi. Et c'est pour cela que j'ai un jour éprouvé le besoin de revenir vers vous, pour tenter de trouver dans vos lettres une chaleur que je n'ai jamais vraiment eu au manoir. Ai-je été naïf ? Il y a deux semaines, j'ai bien pensé que oui. J'étais démoralisé, pour de nombreuses raisons, et je ne suis pas parvenu à faire la part des choses. Pourtant, combien de fois ai-je été confronté à un regard opaque ? À ce jugement d'autrui sur ma sexualité, sur ce que je suis tout au fond de moi ? Vous n'êtes pas une exception, et je comprends vos hésitations, vos réticences. Moi-même, j'ai connu un temps où cette prise de conscience m'a plongé dans une profonde angoisse. Je ne vous l'ai jamais raconté, car je savais parfaitement que cela m'était interdit. Je touchais à un fruit défendu, j'en avais pleinement conscience. Ce n'était pas normal. J'ai eu tellement peur, si vous saviez. J'ai pensé à en finir, de nombreuses fois. Mais, finalement, c'est en lisant des romans, en enquêtant sur cette partie de moi entre les pages, parfois entre les lignes, que j'ai compris que je ne devais pas en avoir honte. Car, il vous faut l'entendre, père : je n'ai pas choisi d'aimer les hommes. Car je le dis, désormais : je n'ai pas voulu tomber amoureux d'un homme. C'est la nature qui m'a fait ainsi. Que ce soit une anomalie ou une rareté, je m'en moque. Je ne l'ai pas souhaité, pensez-le bien. Ne serait-ce pas idiot de désirer quelque chose d'aussi handicapant dans la vie de tous les jours ? J'aimerais vous conter tous ces regards, dans la rue. J'aimerais vous partager la peur qui me prend parfois à la gorge lorsque je croise un groupe d'hommes qui ne semblent pas me porter dans leurs cœurs… Mais serait-ce vraiment utile ? Je sais que vous avez compris tout ce que je viens de vous dire. Vous êtes un homme intelligent ; vous avez même un esprit fin et réfléchi. Prenez le temps de songer à tout ce que j'aurais pu vous écrire.
Peut-être accepter, vous faire entièrement à l'idée. Ne plus être aussi mal à l'aise avec la question… Je sais que c'est difficile, entendez-le bien. Mais je vous en prie. Essayez tout de même.
J'ai décidé de vous revoir… Avant que je ne change de nouveau d'avis. Je ne sais pas ce que les semaines qui arrivent me réservent… Je sais seulement qu'il m'est par moments difficile d'avoir une vision clair des choses, dénuée de sentiments négatifs.
Que diriez-vous d'un rendez-vous à Bronswick…? Je connais un petit café ; il se nomme le Sucroquin doré. Très tranquille et agréable. Je pense qu'il vous plaira, et nous y serons à notre aise pour discuter.
Le treize mars, à quatorze heures. C'est un Samedi.
Cela me rassure d'avoir de nouveau de tes nouvelles, j'ai craint t'avoir perdu de nouveau suite à notre dernier échange.
Saches que j'ai bien compris que rien ne pourra désormais te pousser dans les bras d'une femme et que je suis disposé à t'offrir une oreille attentive comme tout père à tes peurs. Cependant, je ne serais sûrement pas de bons conseils sur ce point-là. Ta mère aura peut-être un autre regard plus ouvert et donc posséder des mots qui te rassurerons plus facilement. Saches par ailleurs qu'elle est heureuse de te savoir en vie et relativement heureux. Elle compte rentrer plus tôt avec tes sœurs pour pouvoir te prendre dans ses bras malgré mon avertissement de te laisser revenir parmi nous à ton rythme. Et tout en gardant ta liberté. Je ne t'enfermerais pas de nouveau comme j'ai tenté de le faire autrefois. Peut-être est-ce un peu tard pour certaines choses, mais je compte bien apprendre de mes erreurs.
Je serais à l'heure dite à ce rendez-vous. Je me demande souvent si tu as changé, grandi, maigri ou grossi ? Ressembles-tu encore autant à ta mère ? As-tu besoin que j'en profite pour te rapporter certaines affaires ? Ou de quoi te permettre de vivre plus aisément ? Si c'est le cas, n'hésite pas à m'en informer par courrier, dans le cas contraire, nous nous reverrons, l'un devant l'autre, autour d'un bon café.
Au plaisir de te revoir.
Charle Henri William de Montgommery, Duc de Duilleag.
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Sam 30 Jan - 1:27
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Sam 30 Jan - 1:41
Merci
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