wish you could see the wicked truth ◊ ft. Oliver

Ilya et Finn avaient gagné le concours.

Oliver aurait dû être fier en conséquence. Après tout, c'était pour encourager Lily et le duo qu'il était venu jusqu'à Lallands (sous prétexte d'accompagner uniquement la jeune fille, puisque son père n'aurait pas apprécié d'apprendre que ses amis masculins s'essayaient à la coordination). Pourtant, il ne pouvait pas empêcher un horrible sentiment de macérer dans son estomac.
Une boule envahissante et douloureuse, qui le rongeait pour une raison quelconque.

Enfin. À quoi se mentir ? Il savait très bien pourquoi il se sentait mal. Il en était juste trop honteux pour vouloir l'admettre. Il était jaloux. Mortellement jaloux.
Jaloux d'Ilya et Finn pour leur complicité et les blagues qu'ils partageaient, jaloux qu'ils aient eu le courage de participer quand lui ne pouvait pas, jaloux qu'ils aient autant de talent quand lui ne savait rien faire de ses dix doigts. Et bien sûr, il était jaloux de Finn. Il avait pu danser - certes indirectement, mais danser quand même - avec Ilya. Ils s'étaient entrainés ensemble pendant des jours et des nuits pour en arriver là. Ils avaient été bénis par des Lovdisc chromatiques (même le public avait commenté là-dessus).
Oliver savait qu'il se faisait des films, puisqu'après tout, ses amis n'étaient pas des monstres, contrairement à lui. Ils devaient aimer les filles, comme les personnes normales. Ça devait être son cerveau malade qui le forçait à s'imaginer des scènes perverses des deux se prenant dans les bras ou s'embrassant lors de leurs entraînements. Dans ces cauchemars, la forêt Eagal semblait toujours plus féérique et moins maudite qu'elle ne l'était vraiment.

L'envie est l'un des péchés capitaux, c'est bien connue. Alors il décida de la garder enfouie bien loin. Ses amis ne méritaient pas d'y être exposés. Ils venaient de gagner, après tout ! L'heure était aux célébrations ! Bren était si fière de son enfant. Ilya semblait plutôt satisfait, lui aussi, peut-être un peu trop rêveur pour comprendre ce qu'il se passait exactement derrière ces iris bleus. Quant à Finn... eh bien, ses expressions faciales étaient toujours difficiles à lire, mais il n'avait pas l'air fâché.
Quelle ordure aurait-il été s'il avait empiété sur leur bonheur à cause de ses émotions impures ? Il continuerait sa journée comme si de rien était et comme à son habitude, attendrait d'être seul pour ouvrir son cœur. Et il avait bien prévu quelque chose au cas où ses amis remporteraient la victoire.

Des fleurs. C'est peut-être un peu cliché, non ? Oliver préfère le terme de "traditionnel". Une part de lui était excitée à l'idée d'offrir, derrière un quelconque prétexte, des fleurs au garçon qu'il aimait. Il avait bien vu un fleuriste à leur arrivée. Alors tandis que Bren parlait de s'installer quelque part en attendant le ferry, Oliver secoua la manche d'Ilya. Le connaissant, il vaudrait mieux le prévenir qu'il s'éclipsait avant que tout le monde ne s'inquiète de sa disparition.

Hum, Ilya ? J-je-je d-dois f-faire q-quelqu-quelque chose. Ca n-ne p-prendra p-pas longtemps, p-promis, lui expliqua-t-il, tout tremblant. Il avait peur qu'il ne devine ses intentions. Il sentit les besoins de se justifier, c'est une sur-surprise, d-désolé.

Le Stranaïte sembla hésiter un instant. Son cadet ne pouvait pas lui en vouloir. Il ne se serait pas fait confiance, à sa place. Pourtant, il finit par acquiescer, bien qu'il ne sembla pas tout à fait rassurer. Il lui sourit néanmoins pour montrer sa gratitude, puis fit demi-tour, disparaissant aussi discrètement qu'il le pouvait. Il ne s'attendait pas à ce que quiconque le voie.

C'était mal connaître Finn. Il avait l’œil d'un Gueriaigle pour certaines choses, et la "fuite" de son ami ne lui avait pas échappée. Ses talents d'observateur n'était égalés que par sa discrétion de Kecleon. Il arriva dans le dos d'Oliver, qui ne le remarqua que quand il l'interpela. Il manqua de bondir de peur.
Mais, en reconnaissant le visage du jeune garçon, sa peur se changea en... malheureusement, pas en joie. C'aurait été trop simple. Il était encore envieux. Il n'arrivait pas à voir Finn sans repenser au fait qu'il aurait aimé avoir sa place. Pauvre Finn... ce n'était pas de sa faute si Oliver avait des désirs malsains. Le blond ne pouvait pas lui en vouloir. Finn n'avait rien fait de mal. Il s'inquiétait même pour lui. Quel bon ami. Quelle frustration de ne pas réussir à le voir dans sa jalousie.

Heureusement, en ce qui concernait les émotions autres que la tristesse, Oliver était doué pour les cacher. Il ne montra qu'un sourire gêné au garçon au Branette.

C'est... hum... c'est g-gênant mais... il se souvint alors qu'il n'offrirait pas de bouquet qu'à Ilya. Finn avait gagné tout autant que lui. Il n'avait tellement, tellement pas envie de lui offrir quoi que ce soit, pourtant. Il ravala sa rancœur. A défaut de ne pas pouvoir priver Finn de son cadeau, il lui gâcherait la surprise, na. J-je v-voulais v-vous offrir d-des f-fleurs. À Ilya et toi. P-pour la v-vic-c-toire. ses joues, comme à son habitude, étaient bien roses. Mais pour une fois, ce n'était pas que par timidité.

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Finn n'avait pas l'air emballé. Le faux sourire d'Oliver retomba aussi sec. Son ami n'avait jamais été très expressif, il l'avait rarement vu très joyeux, mais il se serait attendu à ce qu'il soit un peu plus... flatté ? L'idée de recevoir des fleurs le mettait carrément mal à l'aise, c'était évident. Peut-être pire. L'idée vint à Oliver que le jeune garçon était bien ingrat, qu'il voulait lui faire un cadeau pour lui faire plaisir et que s'il n'était pas content, il pouvait aller se faire voir à Almia.
Évidemment, il n'alla pas au bout de cette pensée. Malgré sa rancune, Finn restait un ami, à qui il ne souhaiterait pas de malheur. Et surtout un ami dont l'opinion de lui importait. Quelle hypocrisie que de lui en vouloir pour quelque chose qu'il ne maîtrisait pas, puis de s'attendre à ce qu'il soit gentil avec lui... Le peu d'excitation qu'il ressentait à l'idée d'offrir coula au fond de son estomac pour y disparaître.

Oh, tu... tu p-pense q-que c'est une m-mauvaise id-dée ? demanda-t-il, tête baissée, Il n-n-'aimerait p-pas ?

Il pensait vraiment lui faire plaisir. Ilya semblait sensible comme lui, alors il s'était dit qu'il apprécierait ce genre d'attention. Il s'était même laissé rêver, imaginant que le grand blond penserait à lui chaque fois qu'il regarderait son bouquet, jusqu'à ce qu'il fane. Mais Finn avait brisé ce rêve en mille morceaux avec un grand coup de réalité. Après tout...

Tu le c-connais sûrement m-mieux q-que m-moi... admit-il tristement.

Ils en avaient passé du temps ensemble avec tous ces entraînements. Ils séchaient souvent les cours, tandis qu'Oliver, trop sage, restait sur les bancs de l'école. Ils faisaient probablement des promenades dans la forêt hantée que le jeune garçon était trop peureux pour explorer. Qui sait ce qu'ils se disaient quand ils étaient seuls ?
Oliver se croyait proche d'Ilya, pour s'être avoué des secrets, pour avoir toujours été sincères avec leurs émotions l'un avec l'autre, mais rien n'empêchait le Stranaïte de faire de même avec son autre ami. Peut-être... peut-être qu'Ilya voyait Finn comme son meilleur ami, et Oliver comme un copain comme un autre. Son cœur se serra d'autant d'envie et de rancœur que de tristesse. Et si sa part rationnelle savait qu'il ne pouvait pas en vouloir à Finn d'avoir été honnête, de lui avoir simplement évité une humiliation, c'était toujours ses émotions qui prenaient le dessus. Il était bien amer d'avoir perdu le peu de bonne humeur qu'il lui restait.

D-de toute f-façon, c'était une m-mauvaise idée. On d-devrait rentrer.

Ses yeux de Voltoutou battu et sa petite voix cassée n'attireraient sûrement pas la sympathie de Finn. Le garçon-fantôme n'avais jamais été bon avec ce genre de choses.

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Contre toute attente, Finn s'excusa. Sa mine était toujours dure à déchiffrer, mais il n'était pas de ceux qui s'excusaient à tout va comme Oliver. Il devait être sincère, ou au moins en partie. Cela n'apaisa qu'en partie le blond, toujours vexé pour la franchise excessive de son ami.
Ce dernier chercha à se rattraper, à excuser son refus par une allergie au pollen. Oliver était plus que sceptique. Enfin, si Finn ne voulait pas de cadeau, il n'en aurait pas, qu'importe son raisonnement.

En revanche,et il avait eu raison de le faire, il mentionna Ilya. Comme l'idée restait bonne pour lui. Qu'il apprécierait cette petite attention. Qu'il serait bête de changer d'avis juste à cause de lui. Une esquisse de sourire revint se dessiner sur les lèvres d'Oliver. Oui, après tout, qu'est-ce qui l'empêchait d'acheter son bouquet à Ilya seul ? Au final, c'était même une excuse parfaite pour exclure Finn. Sa grimace retomba immédiatement sous le poids de la honte. Il voulait à tout prix s'empêcher de ressentir ce genre de choses, mais le naturel revenait au galop.
Et Oliver devait accepter une triste vérité : qu'il n'était pas moins capable d'être jaloux qu'un autre. Sa mère l'avait toujours flatté de ne jamais faire de colère et le voilà, des années plus tard, à découvrir une émotion similaire, qu'il était incapable de maîtriser.

Peut-être... peut-être vaudrait qu'il mieux qu'il évite de trop parler à Finn pendant quelques jours. Le temps que ça se tasse. Puis, ils pourraient redevenir amis comme avant et personne ne le soupçonnerait jamais de la mesquinerie dont il était capable.

Il allait s'excuser quand le spectre de Finn commença à agir bizarrement. Oliver n'y connaissait rien en fantômes, mais le malaise du dresseur du Branette était palpable. Il s'inquiétait pour cette dernière, occupée à couiner et essayer de tirer son humain vers le reste du groupe. Comme si elle était en danger. En danger de quoi ? Oliver ? Drôle d'idée, il en aurait presque ri si la détresse de Dolores ne l'attristait pas un peu.
Finn émit l'idée qu'elle avait besoin de se reposer à l'abri du soleil. Sage décision. Une créature vivant dans l'ombre devait avoir du mal à supporter la météo de Lallands. Ils se sépareraient donc là. Chacun avec une bonne excuse.

D-d'accord. P-prends b-bien soin d-d'elle, dit-il d'une voix hésitante et avec un sourire forcé (qu'il aurait préféré sincère), on se rev-voit t-tout à l'heure.

Il s'éclipsa, non sans lancer un dernier regard à son ami. Silencieusement, il se maudit pour cette interaction. Pourquoi n'avait-il pas été capable d'ignorer ses stupides émotions ? Pourquoi refusait-il d'écouter sa raison, qui lui criait que Finn était innocent ? Est-ce que son amertume s'était ressentie ? Est-ce que Finn se mettrait à le détester ? Des questions qu'il préféra enfouir profondément, elles seraient un problème plus tard.
Pour le moment, il avait une mission de toute importance.

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