Oeil de Luxio | Mission Ilya

notes

Ilya avait terminé sa journée à la SPP. Le calme de celle-ci était le bienvenu après toute l'aventure qu'avait été la mission des Rangers auquel il avait assisté.

Chernaya s'était remise...Plus ou moins. Ilya la sortait la première fois de sa toute nouvelle pokéball depuis l'incident. Elle ne semblait pas avoir de mal à marcher ou à s'orienter mais le Stranaïte avait tout de même sorti Peluche pour la seconder.

Puis il y avait finalement Anya, qui, comme un gros bébé, refusait de quitter Ilya. Elle lui demandait beaucoup d'attention, rendant parfois Queen et Dimitri jaloux mais il essayait de leur expliquer comme il pouvait qu'elle était comme lui, cassée dans la tête.

Cette soirée s'annonçait comme toutes les autres, Ilya connaissait à présent par cœur le trajet de la SPP locale jusqu'à son appartement. Et il connaissait aussi les quartiers à éviter. Mais un grand blond accompagné de deux Luxio et d'un Riolu ne devrait pas attirer de racailles.

Sauf peut-être ceux qui chercheraient à ce faire casser la gueule.

Le Stranaïte n'avait de toute façon pas tellement envie de chercher les emmerdes, il évitait les coins les plus sensibles. C'est vrai qu'il lui arrivait parfois de s'y promener certaines nuits en quête de danger et de sensations fortes mais cette journée était plutôt de celles où l'on s'enroule dans une couverture en buvant une bonne tasse de thé. Ilya cherchait le calme.

Il jeta à peine un œil aux immeubles serrés les uns contres les autres aux fenêtres minuscules et au crépit arraché par endroit et couvert de tags. La rue étaient également remplie de détritus : quelqu'un venait de renverser une poubelle en plein milieu de la chaussée. C'était dire le respect des gens pour ces lieux.

L'endroit n'effrayait pas Ilya, il avait connu pire après tout. Ce lieu lui inspirait juste...De l'exaspération. Il ne saurait expliquer pourquoi mais cet endroit l’énervait, aussi se hâtait-il de passer devant chaque soirs pour rentrer chez lui et s'enfouir sous ses couvertures le plus vite possible.

Mais aujourd'hui, Chernaya s'était arrêtée face à cette ruelle pleine de détritus et observait quelque part dans l'obscurité. Comme si quelque chose l'attirait. Peluche lui donner un petit coup de flanc pour qu'elle avance avec le reste du groupe mais pas de réactions.

Ilya dû s'arrêter, appelant la Luxio ébène d'une voix douce. Toujours pas de réaction. Il se décida à poser Anya à terre pour quelque secondes et tenter de bouger le lionceau lui-même. Mais à peine eut-il soulever les pattes arrières de Chernaya que cette dernière bondit et accouru dans la ruel malgré les cris du Stranaïte pour la retenir.

Blyat... Souffla le blond en grimaçant. Il s'empressa de revenir chercher Anya et demanda expressément à Peluche de pister sa petite sœur. En toute bonne cheffe de meute, la Luxio balafrée s'exécuta.

Les voilà qui s'aventuraient dans ce drôle d'endroit à moitié désert où on ne croisait à cet heure ci que des groupes de voyous hostiles à toute présence étrangère, des mecs ivres gueulant des insanités comme des Groret qu'on égorge ou bien des clodos à moitié endormis et des prostituées faisant le tapin.

Rien de bien glorieux en somme.

Ilya n'avait aucune envie de se rendre dans ce maudit quartier douteux. Mais il ne pouvait pas partir sans Chernaya. Peut-être ne s'était-elle pas remise de la mission et était-elle trompée par ses sens qui autrefois avaient sauvés le Stranaïte de bien des situations ?

notes

La situation le met immédiatement en alerte. Il peste dans sa langue natale. Les sens de Chernaya ne l'ont pas trompé mais il ne voulait pas se retrouver dans une telle situation. Maintenant, c'est trop tard, il ne peut pas partir sans rien faire.

Il se poste droit sur ses jambes et fusille le grand baraqué du regard. Le message est clair : il n'a pas peur. Et non, il ne s'en ira pas.

Teddi, Charge ! Dit-il en stranaïte pour ne pas laisser le temps au gros dur d'anticiper l'attaque. L'effet est là : L'homme se fait éjecté d'une charge en plein ventre et tombe plusieurs mètres plus loin, en plein sur le derrière.

Ilya, quand à lui, court vers le jeune homme en détresse et l'aide à se relever.

Ça va ? Demande-t-il d'une voix inquiète.

Une boule au ventre se forme dans sa gorge. Un mauvais souvenir refait surface, l'image de ce foutu Sergeï qui le hantera sûrement jusqu'à la mort. Et si ce sale type... ?

Non, son point de vue est biaisé. Enfin, c'est ce qu'il espère de tout son cœur, en tout cas, il se met en position. Le jeune homme et Anya derrière lui, Chernaya et Peluche à ses cotés, il est prêt au combat.

Je te laisse une chance de foutre le camps. Dit-il calmement au gros dur. Je rigole pas.

Il sort de sa veste son couteau de chasse, encore dans son fourreau et le montre à l'homme tout en muscles. Il n'est peut-être pas aussi baraqué que lui, mais il a ses pokémons et son arme. Si c'est pour protéger le jeune homme derrière lui, il n'hésitera pas.

notes

Ilya n'est pas vraiment surprit de constater que son adversaire possède lui-aussi un pokémon. Un Matoufeu, hein ? Pas de faiblesses de type, tout devrait bien se passer. Mais...

C'est avec horreur que le Stranaïte observe l'homme injecter quelque chose à son pokémon. Il serre les poings, peste plusieurs fois dans sa langue natale. Si il était passablement énervé, il est maintenant furieux.

Comment tu peux faire ça à ton propre pokémon, espèce de Groret ! Crache-t-il avant de murmurer à l'attention du jeune homme et d'Anya. Bougez pas, bien derrière moi. Ça va être dangereux.

Le combat débute avec un Flash foudroyant de la part de Chernaya, l'ennemi est désorienté un instant, permettant à Peluche d'attaquer avec Crocs Éclair. Tout le corps du Matoufeu tremble lorsque l’électricité parcours son corps. Il n'est pas paralysé, mais il n'en reste pas moins engourdit, ce qui permets à Chernaya le temps de lancer une seconde attaque.

Explonuit.

Après avoir été aveuglé par la lumière, le Matoufeu l'est maintenant par les ténèbres, il cherche autour de lui dans un grognement qui n'a rien de naturel. Comme si il cherchait une proie à trouver à déchiqueter puis il charge...

...Et plante ses crocs directement dans la jambe d'Ilya qui laisse échapper un court cri de douleur avant de répliquer presque par réflexe en enfonçant son couteau dans l'épaule du félin. Il lui faut bien quelques secondes avant de retirer ses crocs de la jambe du Stranaïte et d'accepter de se reculer de quelques pas.

Chernaya et Peluche viennent immédiatement faire barrage entre le pokémon adverse et leur dresseur. Quand au type, il rigole bien. La morsure est profonde et la jambe du Stranaïte menace de lâcher à chaque instant sous son poids mais il tient bon.

Derrière lui, il y a toujours ce jeune homme et Anya. Il ne peut pas les laisser à découvert.

notes

De la douleur, Ilya en a vécu souvent. Sous plusieurs formes. La plus forte qu'il ait jamais connu c'est celle de cette balle qu'il a reçu dans l'épaule de la part du garçon roux dont il ne connaîtra jamais le nom. Enfin, c'était la plus forte.

Jusqu'à maintenant.

Ilya ne sait pas ce que cette seringue contenait comme drogue exactement mais il n'a que le temps d'être surpris...Non, effaré de la vitesse du Matoufeu avant de sentir une douleur atroce lui déchirer tout un pan du visage.

Le reste est trop flou pour son esprit. Il tombe à genoux, la douleur de sa jambe ensanglantée n'est rien comparée à ce qui lui fusille la moitié du crâne. Il n'arrive même plus à réfléchir. Il sent les choses bouger autour de lui mais ne comprends pas la moitié de ce qu'il se passe.

Attention, derrière moi... Murmure-t-il quand il entends la voix du jeune homme s'affoler. Ne se rendant même pas compte que l'autre sale type est paralysé, à terre et que le Matoufeu est lui aussi hors-jeu.

Le sang coule à flot le long de sa joue balafrée. Ses Luxio le redressent comme elles peuvent avec l'aide du jeune homme. Il peut sentir l'étreinte fébrile d'Anya et ses petits gémissements de détresse. Il répondrait bien à son interlocuteur si il comprenait quoique ce soit à la situation.

On le traîne dans la rue, la seule pensée rationnelle qu'il a c'est d'être soulagé que personne ne traîne ici à cette heure-là. Pas de bruit, il a déjà assez mal à la tête comme ça.

Les portes du centre pokémon s'ouvrent à la volée et il entends le cri affolé du jeune homme qui demande de l'aide. Enfin, il croit. Il n'arrive pas à comprendre de qui se raconte autour de lui. On le traîne à nouveau, on le fait s'allonger.

Puis quelque chose est posée sur ses blessures, du désinfectant sans doute, vue l'odeur. La douleur monte en flèche. Il tente de resté raccroché à la réalité mais échoue et sombre dans un état comateux où tout semble si lointain qu'il a l'impression d'être en train de mourir.

Tout ce qui le raccroche au 'monde des vivants', c'est les cris de détresse d'Anya qui ne veut pas voir partir son second dresseur. Il croit sentir les pattes de la Riolu tirer sur son bras, essaye de réagir à ce qu'il pense être la réalité. Mais rien, il n'arrive pas à bouger, à parler, à percevoir...

Alors il se laisse sombrer totalement dans l'inconscience, sans même avoir l'esprit assez clair pour avoir peur de mourir.

notes

Il est encore tout patraque mais tout ce qu'il saisit, c'est qu'il est bien vivant. La douleur est toujours là. Est-ce qu'elle partira ? Ou est-ce qu'elle reviendra parfois, traîtresse, comme celle de son épaule ?

Il n'en sait rien, il est juste content d'être en vie, en réalité.

Les infirmières sont très avenantes avec lui, on l'aide, on lui propose de rester -il refuse, bien entendu, on le guide comme il faut. Ses pokémons le retrouvent avec joie et lui sautent presque dessus. Anya a encore la truffe toute humide et les yeux rougis.

Ilya déglutit. Il a l'impression d'avoir encore joué aux irresponsables. Et si il était mort, qui aurait prit soin de ses amis ? Il les enlacent tous avec tendresse.

Puis une question lui vient aux lèvres, il peine à la formuler, sans doute à cause de la fatigue, des antidouleurs qu'on a du lui donner ou bien de cette douleur qui refuse de partir malgré eux. Mais cette question vient assombrir le visage de l'infirmière qui l'aide.

Mon œil...Il va guérir quand ? Demande-t-il d'une voix usée, fatiguée.

L'infirmière reste silencieuse un instant avant de secouer la tête.

Je suis désolée, nous n'avons rien pu faire pour...Enfin... Murmure-t-elle, visiblement attristée qu'un garçon aussi jeune perde partiellement la vue.

Oh...

Ilya ne sait pas comment réagir, il reste muet un instant avant de hocher la tête. Un sourire amer se dessine sur son visage, même si il le veut sincère, ça sonne faux.

Pas grave, j'en ai encore un.

C'est sans doute la première étape du deuil mais pour l'instant, il n'a pas vraiment conscience que son œil droit ne s'ouvrira plus jamais. Alors il fait comme si tout allait bien. Ce n'est pas grave, pour l'instant.

À la sortie du centre pokémon, il est surprit de retrouver le jeune homme de la nuit dernière. Il se souvient alors de l’entièreté de la situation. Il n'a pas perdu un œil dans une stupide recherche d'adrénaline mais bel et bien pour prendre la défense de quelqu'un, ça le soulage un peu.

Ça fait encore un peu mal. Dit-il juste lorsque le jeune homme essaye de plaisanter sur sa blessure. Puis il secoue la tête quand son interlocuteur parle de compensation. Non, non. Pas besoin, je suis content que vous alliez bien. Votre frère vous frappe souvent comme ça ? J'ai une amie à Doon qui peut vous aider si vous avez besoin de partir.

Il espère de tout cœur que le jeune homme accepte l'offre, ce n'est pas une bonne chose de rester avec un tel type. Il ne serait pas tranquille de le savoir toujours entre les griffes de celui qui lui a volé un œil.

notes

Un coming-out, hein ? C'est comme ça que les kerosiens disent quand ils avouent...Être comme ça ? Rien d'étonnant à ce que l'autre tas de con se soit acharné sur plus petit et plus jeune que lui, Ilya lui adresse un sourire quand son interlocuteur le regarde pour jauger sa réaction.

Oh, bien sûr que non, il ne va pas le juger. Il le comprends tout à fait. Il l'envie même un peu d'avoir passé cette épreuve -chose complètement invraisemblable vu les malheurs que cela attire. Lui pour sa part, a tout planifier, son 'coming-out', c'est le vingt-six septembre.

Tout s'effondrera dans sa vie le vingt-six septembre exactement.

Ilya demande du papier pour écrire l'adresse de Madame Nightingale, évidemment que ça ne la dérangera pas. Par contre, il se demande ce qu'est le Draining Kiss. Quelque chose lui dit qu'il y fera un tour un jour, ça doit être un passage obligé pour les gens...comme lui.

Ce qu'il ne s'attends pas, c'est que le jeune homme fasse un échange d'adresse. Il regarde le papier d'un air étonné avant de comprendre et de rougir. Il bégaie maladroitement un 'mais, je suis...déjà...' avant de se rendre compte qu'il parle dans sa langue natale.

Il sent une petite chatouille sur sa joue et sursaute. Puis il sourit, on dirait les bisous magiques sur les bobos qu'Anastasia faisait quand il était petit. Il n'a pas le temps de dire quoique ce soit cependant, le jeune homme s'enfuit en courant comme une timide jouvencelle. Ilya regarde le papier qu'il lui a laissé, sourire aux lèvres.

C'est un peu flatteur mais il y a toujours Ollie et...

Ollie !

Il se retourne en vitesse et repart dans le centre pokémon, réclamant de pouvoir téléphoner à un proche. On accepte sans trop de question, après tout, ce pauvre gosse vient de perdre un œil pour avoir défendu un autre gamin. Il attends impatiemment que ça décroche de l'autre coté, puis il prie aussi pour que ce soit bien Ollie.

Ça réponds, et comme Sankta Morena est de son coté, c'est bien Oliver.

Ah, bonjour Ollie...Je...Juste pour dire, je reviens bientôt à Doon. J'ai eut...J'ai eut un accident. Blessé à l’œil, rien de grave. Ment-il, lui même ayant du mal à accepter la vérité. Je suis désolé d'être parti...Je...J'ai...Je t'expliquerais...

Difficile d'avouer à Ollie qu'il a failli tuer Johnson au téléphone. Il ne s'imagine pas non-plus que ce sera plus facile en vrai. Mais bon...

Il attends la réponse de son cadet avec un sourire pincé, prêt à se faire engueuler pour la connerie qu'il a faite : le laisser tout seul pendant l'entièreté du mois de juillet.

notes

C'est un grand soulagement pour Ilya d'entendre Ollie parler. Même si ça aurait été pour lui gueuler dessus, tout est mieux que le silence. Mais il a tout de même un pincement au cœur en l'entendant tenter de cacher ses sanglots.

Désolé... Murmure-t-il à voix si basse qu'il se demande si son ami à entendu.

En tout cas, Oliver lui confirme qu'il sera bien là pour son retour. Et même si il se fait raccrocher au nez, le Stranaïte soupire de soulagement. Un soulagement qui est interomput par quelques cris derrière lui. Il se retourne rapidement.

Ah, Peluche s'est mise à briller de mille feux mais rien à craindre, Ilya connait le processus. Elle évolue, tout simplement. Chernaya recule de quelques pas et s'incline face à sa meneuse sous sa nouvelle forme : une magnifique Lionne qui bien qu'avec un œil en moins et une oreille déchirée, inspire tout le respect du monde.

Elle vient se frotter contre Ilya qui lui donne de vigoureuses caresses.

Tu es magnifique, Teddi. La complimente-t-il, un grand sourire aux lèvres, malgré la douleur que ce sourire cause à sa joue balafrée.

Anya, comme pour s'amuser, grimpe sur le dos de la Luxray et s'amuser à jouer au rodéo avec la complicité de Peluche. C'est la première fois qu'il voit la Riolu si heureuse, sans doute est-ce le soulagement de savoir Ilya bien vivant.

Bon, son sourire retombe.

Il lui reste un appel à passer, c'est avec des doigts plus tremblants que ses mains composent le numéro de téléphone. Il grimace en reconnaissant la voix au bout du fil. Bon, ce n'est pas la Limonde, mais...

...Lui et Genya ne sont pas en bon termes ces temps-ci. Et ne le seront peut-être plus jamais vu comment les choses sont partit. Alors c'est avec la voix la plus neutre du monde qu'il annonce simplement :

Bonjour, c'est Ilya. Juste pour dire que je rentre la semaine prochaine, je te rappellerait pour te donner la date exact quand j'aurais acheter mon billet de train. Au revoir.

Sans même laisser le temps à sa sœur de dire un mot, il raccroche. Une caresse pour chacun de ses pokémons et c'est l'heure de rentrer. Il expliquera plus tard à la SPP de son quartier pourquoi il a prit une journée de repos, ce n'est pas comme si ça ne se voyait pas sur son visage après tout, non ?

Il soupire, il aura tout le temps de pleurer sur son œil mort une fois chez lui. En attendant, il a plus sommeil qu'autre chose.