Les amis de mes amis sont mes amis [ft. Camil]

Les amis de mes amis sont mes amis

Le petit apéro entre étudiants que j'avais organisé s'est pas très bien passé. Je ne comprends pas le problème quand il s'agit de mélanger la baie Tamato avec du piment pour faire un bon curry. Pour moi, c'est une évidence. Ces deux ingrédients ont été inventés par Arceus pour être mélangés ensemble. Je ne comprends pas pourquoi personne n'a voulu toucher à son assiette pendant la soirée. Heureusement, j'avais des chips, ils se sont tous rabattus dessus comme des chiens. Les salopards. Ça m'apprendra à cuisiner pour eux. Comble de l'irrespect, en partant de chez moi, Jacob m'a glissé un « évite le curry la prochaine fois » avant de partir. Même partiellement alcoolisé et d'humeur jovial, j'ai été vexé.

« Daisy aime mon curry pourtant ! » J'ai riposté en fronçant les sourcils. Jacob a haussé les épaules et a dit un truc du genre « tout les goûts sont dans la nature » avant de partir. Par Arceus, comment peuvent-ils sortir des trucs comme ça sans même avoir goûté mon curry ! Maintenant j'ai une casserole pleine pour quatre personnes et personne pour la manger. Même Daisy a plus d'appétit et les autres refusent d'y toucher. C'est tellement con de gaspiller de la bonne bouffe comme ça.

Bon, j'y penserais plus tard, pour l'instant, j'essaye de dégriser pour faire un peu le ménage. C'est qu'ils ont tout salopé ces cons. Je jette les bouteilles vides et les emballages de chips, je passe le balais puis la serpillière, je vérifie rapidement dans la chambre ou dans la salle de bain qu'il n'y ai pas de capote usagée (rigolez mais c'est déjà arrivé). Puis je fait un gros sac poubelle. Il est temps de descendre toute cette merde jusqu'aux poubelles en bas de chez moi. Et dire que papa voulait que j'habite dans une résidence secondaire de la famille Braveheart pour mes études. Je préfère mon petit appart étudiant, au moins c'est plus simple de socialiser avec les personnes moins riches que moi. Parce que ceux de mon niveau social sont souvent des péteux irresponsables et snobinards.

Enfin bon, quand j'ai fini tout mon bordel, il est déjà trois heures du mat. Heureusement qu'on est vendredi soir parce que sinon j'aurais morflé pour le jour suivant. Je traîne ma poubelle dans les escaliers parce que j'ai le bonheur de vivre au cinquième étage et je m'apprête à rentrer dans le local à poubelle quand je vois une silhouette occupée à...Fouiller les ordures on dirait. Je manque de sursauter puis je reste sur place, le plus silencieux possible. C'est un humain ou un pokémon ? J'attends de voir. Quand il relève la tête pour regarder à gauche à droite, j'ai ma réponse. C'est un clodo. Quelqu'un a du laisser la porte extérieure du local poubelle ouverte.

C'est con à dire mais ça me fait toujours culpabiliser de voir des clodos. Moi je suis bien tranquille dans mon monde et eux ils crèvent la dalle comme des merdes. Je leur donne de l'argent, évidemment, mais j'aimerais leur donner plus. C'est moins facile que ça en a l'air. Certains sont pas net dans leur tête et sont pas capable de se gérer tout seul pour avoir une vie descente, d'autres sont des addicts à la drogue ou à l'alcool et c'est quasi impossible de les en sortir. Puis il y a ceux qui ont tout simplement choisi cette vie. Je vais pas me montrer débile et les juger, on a tous nos raisons pour telle ou telle chose. C'est juste triste d'en arriver là.

Ce qui me rappelle que ma Dame a prit sous son aile un gamin de la rue. Elle m'a raconté toute joyeuse qu'un jeune homme était venu lui rendre visite et qu'ils avaient pris le thé ensemble. Il avait un petit Brindibou rose, sans doute à cause d'une baie guimauve. Il a dit de merveilleux mots à ma Dame et lui a fait verser quelques larmes de joie. Ah, je sais que c'est pitoyable, mais je ne peux pas m'empêcher d'être jaloux. J'aimerais trouver les mots comme il l'a fait pour faire rayonner le soleil dans le cœur de ma douce Charlotte et pourtant, entre elle et moi, j'ai toujours l'impression qu'il y a une sorte de rupture. Comme si elle préférait la compagnie des autres à la mienne, comme si je lui étais imposé. Ce qui n'est pas totalement faux.

Je soupire lourdement à cette pensée quand je vois un petit truc rose sautiller du coin de l'oeil. Un pokémon rose ? Je me retourne et observe attentivement le clodo cette fois. Il est assez petit, blonds presque blanc et sa peau est super pâle. On dirait un albinos. En tout cas, il a le même air fragile. Et ses yeux, qui ne m'aperçoivent pas encore, sont d'un bleu acier. Ça fait une équation assez rapide dans ma tête : Pokémon rose et petit blond aux yeux bleus. C'est peut-être ce fameux Camil. Si c'est le cas, je me dois d'être aussi poli et accueillant que ma Dame l'a été à son encontre. Alors je descend discrètement ce qui me reste d'escaliers et je frappe doucement la porte déjà ouverte du local poubelle. Je regarde son pokémon du coin de l’œil, c'est bien un Brindibou avec un vieux morceau de pain dans le bec.

« Euh, salut, tu t'appellerais pas Camil par hasard ? »

Bon, c'est pas vraiment comme ça que je voulais le formuler mais maintenant, c'est fait, écoute. Je peux pas faire mieux à cette heure de la journée et avec l'alcool que j'ai ingurgité en plus. J'espère juste qu'il va pas se barrer en courant, les amis de ma Dame sont mes amis après tout.