Keros
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Keros
FORUM POKEMON · ANNEES 60 · AVATARS 200*320 · PAS DE MINIMUM DE LIGNES

En Novembre 1965, Keros fête ses 30 ans. Désormais libre de l'égide de Galar, la région se remet péniblement de deux guerres, et la jeunesse a envie de tourner la page. Sa liberté, elle la trouve autant dans l'activisme que dans des loisirs innocents. Les combats de Pokémon, en phase pour devenir la discipline phare à Keros. La coordination, l'élevage et le métier de ranger ont également le vent en poupe. Une organisation criminelle profite de cette mode pour s'enrichir grâce au braconnage et le gouvernement ne semble pas concerné par la crise écologique et économique imminente.Lire la suite

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Une ombre file dans la nuit... [Saoirse]

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Une ombre file dans la nuit... [Saoirse] Sam 19 Déc - 15:37

Malgré l'heure tardive à laquelle Leon avançait dans la ville, la population semblait toujours agitée. Ses yeux commençaient à le démanger, tantôt submergés par la foule, tantôt attirés par les vives lumières. Le bruit n'était pas en reste, mais ça, ce n'était pas le plus dérangeant. Leon s'arrêta dans sa marche afin de sortir un de ses fameux bâtons de réglisse de sa poche. Il scruta autour de lui et soupira discrètement, aucun doute, Pryderi remportait haut-la-main la course de la ville qu'il appréciait le moins. S'il appréciait les myriades d'étoiles artificielles du Kantoh, le spectacle proposé par ces néons au milieu de ces immenses bâtiments d'un style tranchant sec avec Bronswick l'agaçaient au plus haut point. Mais pas le choix, il devait se rendre à la bibliothèque afin de consulter un ouvrage.

Il s'écarta de la foule et s'accroupit, soupirant à nouveau. Il aurait aimé arriver plus tôt afin de n'avoir à faire que l'aller-retour, malheureusement, son dernier cas fut plus long à régler que prévu et un retard en entraînant un autre, il n'avait pu arriver à temps, malgré toute la vitesse et la concentration dont il avait fait preuve pour traîner sa carcasse, celles de ses pokémons et son side-car jusqu'ici. Tous ces efforts pour arriver devant les portes closes du donjon du savoir. Mais la malchance ne s'arrêta pas là. Alors qu'il comptait tranquillement rentrer chez lui, on le lui interdit. Une affaire semblait en cours dans la ville moderne et le pont était barré temporairement. Malgré toute son éloquence et le superbe passe droit qu'était sa plaque de police, l’accès lui fut refusé. C'est comme ça que, bougon et légèrement agacé, le légiste fut forcé de réserver une chambre pour la nuit.

Immergé dans sa bulle de mauvaise humeur, les bruits autour de lui semblaient s'éloigner. Il passait en revue, dans sa mémoire, les activités à pratiquer la nuit mais rien ne l'attirait. Peut-être que rentrer au motel et dormir serait l'activité la plus bénéfique. Le regard du Galarien s'intensifia, il aurait pu user le vide à l'observer si ardemment. Une légère pression sur son épaule le fit sortir de ses pensées.

Le légiste se releva et sorti une main de sa poche, qu'il leva légèrement, avant de l'y remettre:

-Mes excuses.


Il se décala, laissant à l'inconnu à la crinière flamboyante, biaisée par de nombreux reflets lumineux, le passage libre. Karasu décolla de l'épaule du légiste et commença à voleter derrière lui. Les yeux de glace du jeune homme fondirent vers les yeux du Rouge. Il continua de mâchouiller nonchalamment son réglisse, quelques secondes, tout au plus, avant de le retirer de sa bouche et de demander, sur un ton relativement sobre et solennel:

-Êtes-vous de cette ville ? Je souhaiterais savoir si vous connaissez des endroits calmes, qui offrent une belle vue, si possible.

Sans plus de cérémonie, le brun se réarma de son réglisse et vint poser son autre main, affectueusement, sur la nuque de Morphée, la remerciant, par ce geste, de l'avoir prévenu plus tôt.

Il sembla entendre derrière lui que le vol du Cornébre se faisait de plus en plus frénétique et rapide. Quel bout-en-train il faisait cet oiseau, un réel agité. Pourquoi s'excitait-il à ce point ? Avait-il froid ? Ou bien souhaitait-il simplement attirer l'attention ?

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Re: Une ombre file dans la nuit... [Saoirse] Mer 23 Déc - 23:25


Une ombre file dans la nuit…

highlands - pryderi
ft. Léon Watson
Une odeur de pluie et d’égouts envahissait peu à peu les rues de Pryderi. La nuit était tombée avec une violente averse. Le ciel, voilé de nuages sombres, n'était plus qu'une vaste tenture ébène où ne perçait pas une seule étoile… 
Dans sa chance légendaire, Saoirse était sorti de son appartement peu avant le déluge et avait eu le temps de profiter de cette douche froide gratuite. Désormais, trempé jusqu'aux os, il avançait en pestant sur le trottoir luisant d'humidité, reflétant les lumières diffuses de la ville au crépuscule… Parfois, ses mocassins de cuir crissaient sur le béton détrempé… Il craignait de glisser et de s'étaler comme une crêpe sur ce sol rugueux qui ne manquerait pas de lui casser quelque chose. Ce n'était vraiment pas le moment : n'avait-il pas prévu une randonnée pour le week-end prochain avec son élève préféré ? Il devait être en pleine forme pour assurer son entière sécurité. S'il se blessait, tout tomberait à l'eau, et ce serait bien dommage. Aussi marchait-il le plus prudemment possible, veillant bien à ne pas poser ses pieds n'importe où.
La colère avait bien évidemment pris une place importante dans sa poitrine déjà oppressée par la déception de ne pas avoir trouvé ce qu'il désirait au kiosque qu'il avait rejoint en trottinant sous la pluie. Mettre la main sur le premier album de son groupe de soul préféré n'avait pourtant rien de difficile…! Comment se faisait-il que Keros puisse souffrir d'une telle lacune ? Cette région était un véritable placard à balai. Il n'y avait rien à en tirer, si ce n'était quelques jolis paysages ou des fermes à bon prix et de merveilleuses occasions de monter un business rentable. Le rouquin pensait de plus en plus à sa chère Unys. Pourtant, en arrivant à Keros, il avait pensé que cette mélancolie lui passerait assez vite pour qu'il n'ait pas à s'en plaindre… C'était raté, visiblement. Elle croissait de jour en jour et se chargeait même d'un certain mal de vivre.
Bref. Rien n'allait vraiment ; le moral était au plus bas ; seuls les cours qu'il pouvait offrir parvenaient à lui donner un peu de baume au cœur, même si certains élèves avaient l'art de l'impatienter. Tous ne comprenaient pas aussi vite les consignes que Rohann ; c'était terriblement embêtant. Si Saoirse était conscient d'éprouver une grande préférence pour le petit galarien, il ne l'admettait pas facilement. L'affection grandissante qu'il se sentait nourrir pour lui lui était grandement inconnue. Sans doute un lien presque fraternel… Son désir de le protéger et de l'aider à tout prix à réussir ne lui faisait pas penser à grand chose d'autre…

En repensant à leur petite sortie à Bronswick pour visiter la SPP, un léger sourire vint étirer faiblement ses lèvres crispées en un rictus bougon, et le petit roucoulement interrogateur de Tara, qui trottait derrière lui, le tira de ses pensées :

━ Quoi ? Oui, moi aussi j'ai froid. Mais on va rentrer, d'accord…? On est à deux pas de l'appart… Ah.

Ah. C'était sans doute la seule chose qu'un être humain normalement constitué pouvait se dire face à un tel spectacle. Ah. Suivi d'un juron, que nous ne citerons pas.
Comment se faisait-il qu'en à peine une demie-heure toute une bande de poulets armés jusqu'au dent avait quadrillé la zone par laquelle, évidemment, Saoirse devait passer pour rejoindre son humble appartement ? Il insulta la terre entière, cracha dans le col de son manteau quelques mots qui auraient fait rougir un simple passant. Et lorsqu'il s'avança remonté à bloc pour s'expliquer avec les forces de l'ordre, on lui barra fermement le passage, sourcils froncés et veine apparente. On lui expliqua rapidement qu'une étrange affaire était en cours, et que le secteur du Pont Léviator était aussi inaccessible. Le rouquin tourna donc les talons, plus frustré que jamais, l'air idiot au beau milieu de cette avenue qui ne lui offrait aucune issue de secours.
Tara plongea son regard fendu dans ses iris noisettes, et ils échangèrent tout deux silencieusement quelques sentiments communs et peu enclin à l'acceptation docile. Pourtant, ils n'allaient certainement pas se jeter dans la masse pour passer de l'autre côté, et à sa connaissance, il n'y avait pas vraiment d'autre moyen d'atteindre son quartier si ce n'était faire un énorme détour pour rejoindre de petites ruelles en prenant sa destination finale à revers…
Aussi décida-t-il d'attendre que la rue se libère, le temps qu'il faudrait. La lassitude était tombée sur ses épaules comme un sac de plomb. Saoirse inspira profondément, ferma un instant les yeux, calma ses humeurs… Ou pouvait-il bien se rendre ? Un pub ? Un café nocturne ? Une discothèque…? Rien de tout cela ne le charmait vraiment.
Il se mit pourtant en marche, sans vraiment savoir où aller… Et sillonnant une avenue chargée de monde, qui brillait d'insignes colorées irritantes pour sa rétine, il se rangea sur un trottoir, rasant les bâtiments, jusqu'à manquer de trébucher sur un étrange individu accompagné de deux pokémon qui patientaient sagement à ses côtés. Grognant, Saoirse obtint de l'homme qu'il se décale pour le laisser passer… 
Mais quelle était donc cette manie de s'accroupir en travers des trottoirs ? Ce n'était pas la première fois qu'il observait un tel phénomène… Les gens n'avaient-ils plus aucun savoir-vivre…?
Tara, imitant sa mauvaise humeur, laissa entendre un miaulement mécontent et prit les devants pour avertir son maître d'un quelconque danger… L'Unysien darda finalement un œil courroucé sur le petit groupe qui leur avait fait obstacle et croisa le regard de l'homme qui en profita pour l'interpeler. D'une oreille distraite, le rouquin l'écouta et arrêta sa course, forçant quelques passants à le dépasser sur le côté, au bord du trottoir. Son attention se fixa quelques instants sur l'étrange bâton qu'il mâchouillait… Un original, sans doute :

Bonsoir, fit-il avec insistance, pour souligner l'absence de cette belle formule de politesse dans la demande du brun. Malheureusement pour vous, je n'ai rien de tel qui me vienne en tête… Si ce n'est quelques coins relativement éloignés comme les toits de certains immeubles… Mais ce n'est pas forcément autorisé, et parfois payant.

Il s'interrompit et pinça un peu les lèvres, comme il avait l'habitude de le faire lorsqu'il était embêté ou qu'une question lui brûlait les lèvres.

━ Et vous ? Vous avez une idée d'un endroit où il me serait possible de boire un coup avant de rentrer…? Ces imbéciles de flics ont quadrillé ma rue… Je suis obligé d'attendre qu'ils se décident à débarrasser le plancher…

Son visage était resté imperturbable, quoi qu'un peu crispé. Seul son regard noisette lançait des éclairs, visiblement contrarié. Cette soirée commençait définitivement à être longue et très désagréable. Il lui tardait d'en finir… Et s'il devait s'aider de quelques verres d'alcool, il le ferait volontiers…
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Re: Une ombre file dans la nuit... [Saoirse] Sam 26 Déc - 18:46

Les premiers mot de l'inconnu ne vexèrent guère Leon, le roux venait de viser juste. Le légiste leva quelques secondes les yeux, il assimilait l'information et réfléchissait un peu. La politesse et les us sociaux furent toujours compliqués pour lui. Il n'en voyait pas l'utilité mais les gens semblait bien plus enclins à communiquer docilement si l'on usait de ces manières. Ses yeux vinrent vivement se reposer droit dans les agates brutes de son interlocuteur.

-Ah, effectivement. J'ai oublié ceci: Bonsoir monsieur.

Le ton neutre et sans aucune agressivité, Leon, tel un enfant qui venait de se rendre compte de son erreur se corrigeait. Les battements d'ailes incessants de Karasu, derrière lui, commençait à l'agacer, ainsi, le brun leva son coude gauche, signalant à l'oiseau qu'il lui offrait un perchoir. Le volatile exprima son accord d'un coassement et vint prendre appui sur l'épaule du légiste. Une légère pression se fit sentir sur le deltoïde gauche du coupe-cadavres, une chance que les serres de cet oiseau de mauvais augure n'eurent été plus grandes.

Son attention toujours fixée sur le roux, Leon écouta ses réponses et attendit que ce dernier termine avant, d'à son tour, lâcher quelques mots. Les toits avaient allumé toutes les cases de sa curiosité et, bien qu'impassible, il fallait bien admettre que cette idée lui plaisait énormément. Le bruit ambiant évolua en brouhaha, quelques instants. Des cris purent être perçus malgré tout, au loin, ce qui provoqua un léger temps d'arrêt chez Leon. Ses saphirs oculaires glissèrent légèrement à droite et ses oreilles s'ouvrirent mais aucun autre hurlement ne se manifesta.

-Je n'avais pas pensé aux toits mais je dois admettre qui l'idée me plaît bien. Je ne peux pas vous répondre, je ne connais pas bien l'endroit. Je comptais faire l'aller-retour mais... comme vous dites, "la flicaille" a fermé le pont.

Le légiste s'amusa en son fort intérieur puis il reprit:

-Mais peut-être pourrions nous fusionner vos deux idées et grimper là-haut, après être passé acheter de quoi boire et manger ? Je vous invite pour vous remercier du tuyau et m'excuser d'avoir été dans votre passage. Qu'en dites-vous ?


Sa phrase sonnait mal. Malgré ses efforts et ce qu'il put apprendre, Leon peinait toujours à s'exprimer de façon classique. Non pas qu'il n'essayait pas, au contraire, mais les gens comprenaient souvent mal, ou pas du tout. Ainsi, il avait opté pour une approche plus... directe et naturelle.

Leon s'arrêta de causer puis il remit son divin réglisse dans sa bouche. Sa main glissa vers la poche dans sa veste. Il hésita puis se résigna. Cet étranger ne jouait sûrement pas aux cartes.


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Re: Une ombre file dans la nuit... [Saoirse] Mer 6 Jan - 23:32


Une ombre file dans la nuit…

highlands - pryderi
ft. Léon Watson
Si Saoirse avait bien horreur d'une chose, c'était de ne rien pouvoir faire : il était hors de question qu'il se tourne les pouces pendant plus d'une heure – et qui savait combien de temps ces Poussifeu allaient bloquer son quartier ? –. Non, ce n'était pas dans ses habitudes d'être désœuvré. Boire calmerait ses nerfs déjà à vif après cette terrible journée, et surtout cette soirée infernale. Bien sûr, il ne se soulerait pas jusqu'au bout de la nuit… Mais passer par le Branette Jacasseur ne serait sans doute pas désagréable : il glisserait une pièce dans le juke-box, mettrait un titre entraînant de soul, et se laisserait aller à deux verres de malt sec, brut… Juste assez pour faire tourner un peu la tête, le libérer de cette pression qui pesait sur ses épaules et appuyait désagréablement sur sa poitrine.

La proposition de l'homme, dont il n'attendait pas grand chose en réalité – ne lui avait-il pas posé cette question que pour avoir le plaisir de râler et de se plaindre de sa situation ? – l'étonna autant qu'elle lui plut. Bien sûr, il était le premier à dire que monter sur les toits de Pryderi était tout à fait illégal… Mais en même temps, combien de fois l'avait-il fait ? Un bon nombre. Assez pour recevoir une belle amande sans doute… Bien heureusement, il était trop discret et correct pour qu'on puisse le soupçonner de nourrir de telles intentions. Et, après tout, il avait bien le droit de se faire plaisir de temps à autres : monter sur les toits de cette grande ville aux allures de Volucité était son petit péché mignon des jours difficiles : ce qui faisait battre son cœur un peu plus vite, un peu plus fort, quand il craignait qu'il ne s'arrête pour de bon, malmené par la vie et ses aléas.
C'était aussi l'activité préférée de Tara, et de loin. À l'origine de ces conquêtes de la voûte céleste : Christie. Elle, jeune femme si sage et raisonnable en apparence, aimait se donner des défi, les jours d'énergie dévorante. Et, bien assez tôt, elle avait trouvé drôle d'entraîner son fiancé avec elle dans ses petites aventures. Le rouquin, à l'époque, avait été étonné de ces bravades, et s'il s'était tout d'abord montré hésitant, il l'avait finalement accompagnée : tout pour impressionner sa belle, bien que c'était elle qui le surprenait un peu plus chaque jour.
Aujourd'hui, ces petites excursions aux sommets des villes avaient un agréable goût de nostalgie : Tara et lui en profitaient chaque fois longuement, se gorgeant de l'air pur citadin, et redescendaient ressourcés pour quelques temps. C'était un bonbon acidulé, sucré, dont on se lassait jamais.
Au fond, c'était comme la randonnée : les habitudes ne se perdaient pas. Le besoin était bien là, indestructible, déterminé à les faire flancher un jour ou l'autre. On finissait toujours par céder à ces pulsions de liberté.  

Seulement, ce soir-là, Saoirse ne savait pas vraiment s'il pouvait accepter cette proposition, bien que l'idée lui semblait tout à fait respectable. Il ne connaissait pas l'homme, n'avait fichtrement aucune idée d'où il venait, de ce qu'il était et faisait dans la vie… Et même s'il lui paraissait tout à faire banal, et même plutôt stable au vu de ses Pokémon qui le suivaient gaiement, il était sans doute prudent de réfléchir à ces détails avant de se jeter aveuglément dans l'inconnu.
Aussi lui offrit-il un petit sourire grimaçant relativement discret, pinçant un peu les lèvres dans ce moment de haute indécision. Il haussa doucement les épaules et jeta quelques coups d'œil circonspects autour de lui :

━ Eh bien, fit-il, laissant entendre une longue suspension dans sa voix comme dans ses pensées.

Le blanc le plus total : que pouvait-il répondre à cette proposition ? Ni oui, ni non ? Ou peut-être les deux…? Dans ces moments de trouble, qui avaient l'art de l'embarrasser, Saoirse n'y allait pas par quatre chemins : franchise, franchise. Il n'y avait que cela de vrai, après tout. Pourquoi s'évertuer à trouver une autre solution alors que la plus simple, cette formule magique qui venait à bout de tous les problèmes, était aussi facile à prononcer ?

━ Je ne sais pas. C'est-à-dire que je vous connais à peine… Pas du tout, même. Et vous conviendrez qu'on ne va pas sur les toits avec un parfait inconnu ; ce n'est pas ce qu'il y a de plus prudent. Et d'ailleurs… C'est aussi valable pour vous. Qui sait quelle genre de personne je pourrais être, n'est-ce pas ?

Saoirse laissa finalement entrevoir sur son masque de porcelaine, piqué de quelques tâches rousses, un sourire amusé, fébrile mais assez sincère : la situation, bien qu'étrange, lui était assez plaisante. Malgré ses airs de garçon fermé, coincé – ce qu'il était sans doute un peu ; on ne s'inventait pas ce genre de posture pour son seul plaisir –, il appréciait ces petites surprises du quotidien qui pimentaient sa vie bien morne. Tara, par ailleurs, semblait toute excitée à l'idée de retourner sur les toits, et faisait déjà la cour à son maître, se frottant contre ses jambes et affichant des sourires qu'elle pensait sans doute mignons, mais qui n'en étaient que plus effrayants. L'Unysien fit entendre un petit soupir, agacé par ce manège, et se pencha pour prendre la demoiselle dans ses bras, toute ronronnante et câline, prête à lui faire ses quatre volontés pour obtenir ce qu'elle désirait plus que tout au monde.
Le rouquin plongea finalement son regard un tantinet plus chaleureux mais noyé d'indécision dans les prunelles bleutées du jeune homme.
Il se tenait toujours devant lui, son bruyant Cornèbre sur l'épaule et son bâton – était-ce de la réglisse… Ou une nouvelle gomme à mâcher ? – entre les lèvres : il n'avait pas l'air bien méchant… Si ? Peut-être un peu étrange, c'était vrai. Mais n'était-il pas celui qui disait toujours que les plus originaux étaient aussi les plus sympathiques et divertissants ?
Il céda finalement à son désir profond, et lui fit signe de le suivre :

━ Oh… Et puis, au point où j'en suis…! Venez. Faisons connaissance en allant chercher de quoi boire et manger une fois là-haut… Il esquissa un léger signe du menton, désignant un gros immeuble non loin de là, qui perçait la nuit de ses milliers de fenêtres où se reflétaient les lumières extérieures. Il y a celui-ci qui peut faire l'affaire. Et d'autres, un peu plus loin… Tous sont des coins relativement agréables…  Il lui tendit une main ferme, tenant sa Miaouss avec son bras libre, assez fermement pour qu'elle n'ait pas à planter ses griffes dans son pull, ce qui aurait été assez douloureux. Saoirse. Olsen. Mais Saoirse, c'est déjà bien. À qui ai-je donc l'honneur…?

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