Pas BreithFeat. | Hiro Kano

Bronswick. Si Clyde n'est pas un grand amateur des grandes villes, c'est bien l'une des seules qu'il trouve supportable. En quelque sorte. Pour autant, il ne s'y rend jamais par plaisir. La plupart du temps dans le cadre de son travail. Ce soir, pourtant, il y met les pieds pour une raison bien différente. Portant un grand manteau noir pour se protéger du froid hivernal, il serre son col en soufflant un grand nuage de buée. C'est par où déjà?

Clyde a dû faire des pieds et des mains pour avoir l'adresse d'un ancien collègue. C'est assez rare qu'il se donne cette peine pour quelqu'un. Il ne sait même pas comment définir leur relation. Ils ont passé des bons moments ensemble. Il a été là lors de certains moments difficiles. Clyde est loin d'être un beau parleur, mais il savait faire acte de présence. Parfois, c'est tout ce qu'une personne a de besoin. Pourtant, cet homme s'en veux quelque peu de ne pas toujours pouvoir en faire plus. On peut le voir comme une tentative de faire plus. D'essayer de reprendre contact avec quelqu'un. Ils ne se sont jamais vraiment parlé. Clyde n'est pas vraiment bavard, mais ça ne l'empêche pas d'apprécier la conversation. D'apprécier la présence de certaines personnes. Hiro est l'une de ces personnes-là. Même si sa fierté l'empêcherait de l'admettre, ça lui manque d'être en sa compagnie. Il admire son attitude joviale. Lui qui n'a pas réussis à la conserver. Lui qui n'arrive pas à la feindre même lorsqu'il le voudrait. On accuse souvent son manque d'émotivité, d'être trop froid. C'est une chose qu'il se reproche lui-même. C'est tout simplement comme s'il n'était plus capable de ressentir certaines émotions comme avant. Avant quoi au juste? Il n'a pas vraiment envie d'y penser.

Retrouver son chemin dans une ville qu'il ne connaît pas particulièrement n'est pas aisé. Surtout lorsque l'on s'entête à ne pas vouloir demander des directives. De toute manière, avec sa drôle d'allure, on a plutôt tendance à changer de trottoir. Son regard ausculte chaque recoin de son environnement. Ses mains trahissent une certaine nervosité, il ne cesse de tirer sur ses manches ou de replacer sa casquette. En particulier pour mieux cacher ses yeux lorsque la lumière environnante lui semble trop forte. Autant dire qu'il a l'air louche. Ce qui, apparemment, ne sors pas tant du lot au vu du quartier dans lequel il met les pieds. Il se plaindrait un peu qu'Hiro ait à vivre en de tels endroits. Le Ranger ne peut pas y faire grand-chose, alors il garde ses inquiétudes pour lui. Ce n'est pas pour ça qu'il est là. Clyde veut juste... Prendre de ses nouvelles? Enfin, comment dire? C'est l'une des rares personnes dont il se souci un minimum. Ça l'a frappé comme d'une évidence que rien ne l'empêchait de lui rendre visite. De lui faire la conversation. Il faut dire que notre bonhomme n'est pas des plus social. Alors, ça lui a pris beaucoup de temps pour faire cette constatation. Il ne sait même pas ce qu'il lui dira lorsqu'il sera en face de l'ex Ranger.

Pourtant, c'est qu'il devait vite y réfléchir . Puisqu'il est à présent en face de la porte d'appartement. Il hésite. Se passe une main sur la nuque. Cherche par avance ses mots. Va pour frapper, s'abstient, y réfléchit encore. Lorsque la pensée lui vient de faire demi-tour, il se ravise et se décide enfin à toquer à la porte. A-t-il frappé trop fort? Est-ce que c'était déplacé de sa part de lui rendre visite sans prévenir? Ah, pourquoi il y pense maintenant? C'est déjà fait. Clyde prend une grande respiration. Ce n'est pas le moment de flancher. Il peut le faire. Il peut ouvrir la conversation. Peut-être pourrait-il essayer d'imiter l'un de ses collègues? Après tout, Hiro n'est pas le seul rang- la seule personne à être joviale dans son entourage. Il pourrait emprunter des propos d'une de ces connaissances. Ne serait-ce que pour se rendre plus amical. Bon, c'est le moment où jamais. La porte s'ouvre. Clyde fait un timide signe de main. Bon, on se lance. On peut le faire.

- H-heeeey, Hiro, alors ça roule? Oh le con. Il est en chaise roulante.

Enfin, pas actuellement. Mais ça le frappe qu'une fois qu'il a sorti ces mots. En même temps, quelle idée de vouloir prendre exemple sur Aeos. Pire idée. Clyde masque vainement son malaise en toussant dans son poing. Il marmonne des excuses plus ou moins audible. Puis il redresse la tête vers son camarade avec un vague sourire. Si on peut appeler ça comme ça.

- Je veux dire. Enfin- euh. J'avais oublié de t'offrir ça durant Breith.

Est-ce qu'il devrait plutôt le vouvoyer? Bon, trop tard pour y penser. Clyde met une main dans une de ses poches de manteau et en ressors un livre. Bon, il était censé être dans un joli emballage cadeau, mais apparemment qu'un certain félin y ait mit les griffes. On peut lire sur son visage que lui-même ne s'y attendait pas. Il s'assure que la couverture sois au moins en bon état. Ouf, aucune égratignure à ce niveau-là. Du moins, aucune de visible. Étrange, il aurait juré que son cadeau était entier avant le départ. Sentir quelque chose bouger dans sa poche, ce qui lui apporte une réponse. Dans toute son agitation, il n'avait jamais calculé que Poséidon ait décidé de l'accompagner. Le voilà qu'il sort la tête avec encore un bout de ruban entre les dents. Bon, d'un autre côté, il n'aura pas à affronter ce malaise seul.

- Mh, pardon pour ça... j'ai demandé des avis autour de moi et on m'a recommandé ce roman. Je me suis dit que- qu'il te plairait. Enfin, au pire, tu le laisseras attraper la poussière. Tente-t-il de plaisanter en lui tendant le livre.

Au moins, ce n'est pas sa pire tentative de sociabilité. Peut-être est-ce une bonne chose qu'il ne soit pas bavard. Ça a le mériter d'empêcher ce genre de situation malaisante de se produire plus souvent. Une fois le cadeau remis entre les mains de son ancien collègue, Clyde tire sur l'extrémité de sa casquette. Il ne regrette pas cet achat, il a toujours eu du mal à porter des lunettes, même de soleil. C'était l'alternative évidente pour protéger ses yeux fragiles un minimum. Il l'a choisis puisqu'elle était la seule du lot qui lui semblait confortable. Ça lui est égal si la casquette est d'une couleur ridicule, ce n'est pas comme s'il pouvait y porter attention.