Brutus n'a pas exactement une gueule de winner. Il n'a pas vraiment le profil des Pokémon de l'équipe d'Hilda. Il n'est pas géant comme Lilith ou intimidant comme Mars. Il ne possède pas les crocs d'Alpha ou les griffes de Gigi. Même Una, dans toute sa candeur, a le mérite d'arborer deux vilaines cornes de démon qui font peur aux enfants et aux Arkéens.

Mais Brutus, lui... il a bien deux petites canines qui dépassent de sa mâchoire inférieure, mais il bave plus qu'il ne mord. Pire qu'on Grondogue. Mais là où ces canidés paldéens font l'effort de paraitre méchants, l'Otaria a toujours l'air perdu. Il regarde passer tous les visiteurs avec un regard suppliant, mais personne ne s'arrête. Parce qu'il n'est pas très beau... et que personne ne remarque qu'il est chromatique.

À vrai dire, Hilda ne l'aurait pas remarqué sans les conneries le Boo. Tous les regards se sont tournés vers lui en entendant un hurlement à déchirer le cœur, tout ça pour tomber sur un Otaria en panique et en larmes. La raison : la rediffusion des Dents de l'Océan sur le Motisma-Télé.
Mais on ne peut pas en vouloir au spectre. Il est un peu facétieux mais ne s'attendait probablement pas à une telle réaction. La peuve, il avait l'air tout penaud et désolée, une tête qu'il ne tirait pas, même après avoir montré des scènes d'horreur à des gamins. Alors c'est Hilda qui a pris. Sa punition pour ne pas avoir su gérer Boo : aider ce pauvre Brutus à se remettre de ses émotions. Et si, comme toute punition, elle l'a fait en roulant des yeux, elle doit bien admettre qu'il y en a de pire que de s'occuper d'un Pokémon. C'est en partie pour ça qu'elle étudie pour être ranger après tout.

Bon, ça va mieux maintenant ?

Si au départ elle se sentait un peu coupable, l'adolescente a désormais l'impression que le phoque profite un peu de la situation. Il semble bien détendu, a le ventre prêt à éclater tant il a mangé de friandises, et tend le même bidou pour se le faire gratter. Il sourit de plaisir, mais à chaque fois que la demoiselle a le malheur d'arrêter, il repart en larmes et des regards noir se fixent sur elle.
Est-ce qu'elle va au moins pouvoir s'en aller un jour ? Elle se sent prise en otage par cette boule de suif tout juste assez intelligente pour faire semblant de pleurer.

Il est désormais dix-huit heures. La SPP s'apprête à fermer, mais Brutus continue de réclamer de l'affection. Hilda soupire. Ca ne lui plait pas de le dégager comme ça mais pas question de rater le repas à l'internat. Elle tapote doucement le ventre de l'Otaria pour lui faire comprendre que sa séance câlins est terminée avant de se lever.
Cruelle erreur. Elle n'a même pas le temps de s'accroupir qu'elle se fait plaquer au sol par près de quatre-vingt dix kilos d'amour. Cette fois-ci, Hilda ne râle pas. Elle regarde les yeux de Brutus. Elle les regarde vraiment... et constate que cette fois, ce ne sont pas des larmes e Crocoribl qui perlent sur ses joues. Elles sont bien réelles, et elle comprend seulement à quel point le Pokémon Eau est en manque. De quoi ? De tout. D'attention, d'affection, de compagnie... on le lui a dit. L'Otaria suscite peu d'intérêt. Elle n'avait juste pas imaginé... que ça serait à ce point.

Désormais, Hilda se sent plus coupable qu'autre chose d'avoir voulu le chasser. Un sentiment qu'elle n'apprécie pas vraiment. Elle se sent faible... elle ne doit pas, pas elle ! Pas alors qu'elle a mis tant d'année à se forger cette personnalité de dure à cuir. Elle a néanmoins une idée... c'est un coup de tête, c'est peut-être stupide, mais ça lui donne l'illusion de choix.
Puisque Brutus ne veut pas la lâcher, elle le ramènera, juste pour pouvoir être tranquille. Et pas du tout parce qu'elle a commencé à s'attacher à sa bouille de con.