Wallis Campanella

Histoire

Un beau jour, sur Keros, une classe de collège accueillit un nouvel élève.

" - Je m'appelle Campanella, enchanté de vous rencontrer! "

C'était tout.

Enfin, cela aurait pu être tout, mais ses camarades de classes était bien trop curieux pour se contenter de cela : la question principale, dans un premier temps, était de savoir d'où sortait ce gamin ? Il n'avait clairement pas un faciès d'occidental, sans compter son accent à couper au couteau, et l'aisance de Campanella à esquiver les questions concernant ses origines ne faisaient que renforcer l'intérêt qu'éprouvaient ses camarades à les percer à jour. Tout le monde dans l'école avait entendu parler du petit nouveau et cherchait à en savoir plus, ne serait-ce que pour se vanter à ses amis ensuite : même s'ils trouvaient parfois Campanella dur à cerner voir frustrant à refuser de répondre aux interrogations ainsi, reste qu'une bonne partie de gamins s'était pris au jeu.

Campanella était un bon élève : attentif en classe, aux participations pertinentes, les professeurs n'avaient rien à dire de lui si ce n'est craindre qu'il se laisse influencer par les mauvaises teignes. C'est qu'il abordait tout le monde avec le sourire, le petit, et ne faisait pas la différence entre l'intello de service ou la pimbèche : si on le surprenait régulièrement à lire entre les cours, il interrompait volontiers son ouvrage afin de rejoindre les autres : il finissait souvent embarqué de cette façon dans de mauvais coups mais, au vu de son attitude globale, les adultes ne lui en tenait que rarement rigueur. C'est d'ailleurs ces fauteurs de troubles qui furent les premiers à découvrir le moindre indice sur lui : parce que, saisissant le bouquin pour interpeller Campanella, son camarade fut bien hébété de n'y lire que des sinogrammes.
Il était vrai que personne n'avait jamais eu la curiosité de demander ce qu'il lisait avant.

Après cet incident, la curiosité concernant le garçon se dissipa petit à petit : on considérait le nouveau comme simplement "bizarre", sans que ce ne soit particulièrement positif ou péjoratif. Si on n'allait plus particulièrement vers lui, Campanella n'avait cessé de cultiver les quelques relations qu'il avait établit et était donc parvenu à se trouver un groupe d'ami. Le secret s'étant ébruité, il n'avait plus de réservations à évoquer Kanto et la vie qu'il y menait, mais ses camarades n'étaient pas dupes au point de ne pas remarquer tout ce qu'occultait de mentionner le jeune homme. Le principal concernait ses parents : on pensait qu'il était venu avec eux à Keros mais remarqua vite, une rare fois où on visita sa maison, qu'il n'y avait pas de proximité entre lui et le couple d'adulte vivant sous un même toit. Quand ce genre de sujets était abordé dans leur groupe, Campanella était le seul à n'avoir rien à dire et se contentant d'écouter des anecdotes mondaines avec autant de curiosité.

La fête des mères, on aperçu juste Campanella discuter avec le professeur (malheureusement trop loin pour être entendus) avant qu'il ne s'éclipse le reste de la journée. Il fallut attendre le Soraid de cette année -festivité que le jeune homme découvrait pour la première fois- pour que ce dernier lâche sans trop y penser :

" - Mais la tombe de ma mère, elle est trop loin pour que j'y dépose des fleurs... "

La vérité finit bien par être ébruitée grâce aux commères du quartier : la mère de Campanella était morte sous les coups de son mari, il y a de cela quelques années, laissant son fils derrière elle. Les usages du Kanto préfèrent alors que la garde de l'enfant revienne à des proches, mais les grands-parents du côté paternel ne voulait rien à voir avec Campanella et ceux du côté maternel étaient trop âgé pour s'en occuper : la seule option viable était donc sa tante maternelle, malgré le fait que cette dernière ait rejoint son mari à Keros depuis quelques temps déjà. La seule chose qui rapprochait Campanella de sa tante, sa "mère adoptive", c'était bien de faire le deuil de la même personne.

Campanella ne voulait évidemment pas que tout cela se sache, car il regrettait de n'avoir rien pu faire en tant que "deuxième homme de la maison" (bien que son âge ne comportait encore qu'un chiffre à l'époque) : il se souvient encore de sa mère le rouspétant, après qu'il se soit coupé sur un bout de verre en tentant encore de réparer les dégâts causés par une soirée trop arrosée de son paternel. Lorsqu'elle bandait ses plaies (parce qu'évidemment il n'était pas capable de le faire, tout ce qu'il était bon pour c'était salir les tatami avec son sang), la seule chose qu'il voyait, c'était à quel point les mains de sa mère était dans un bien pire état que les siennes. Et s'il lui venait à l'idée de se noyer dans une rivière, comme le garçon de sa nouvelle préférée, il se ravisait car il était conscient que lui ne serait jamais pardonné.

Lorsque la situation prit fin, le garçon aurait sincèrement voulu disparaître rejoindre sa mère. La réalité, cependant, n'était pas aussi simple et tout ce qu'il put faire, c'est emprunter le prénom de son personnage préféré -sous l'excuse d'intégration dans son nouveau pays- en espérant avoir aussi emprunter sa détermination afin que "l'ancien lui" ne soit plus. Après avoir éclaircit la situation auprès de ses amis -inquiets après avoir entendu des versions un peu plus fantasques de l'histoire- il s'attendait à ce qu'ils l'abandonnent après l'avoir allègrement rabaissé : qu'ils fassent preuve de sincère compassion et regrets vis-à-vis de leur précédente insistance n'était pas dans ses prévisions. Quoi qu'il en soit, le sujet de son passé ne revint plus : soit car la majorité de son entourage, désormais, était au courant, soit parce que ses proches invitait quiconque se montrait trop indiscret à se mêler de ses oignons.

De nos jours, Campanella maintient sa place dans un groupe d'amis proches mais n'a toujours aucune difficulté à venir aborder d'autres individus. Le livre qu'il passait ses journées à lire prend la poussière dans son bureau tandis qu'il explore de nouveau centres d'intérêts : il veut en savoir plus sur les Pokémon, pour commencer. Il a toujours été happé par les quelques combats qu'il a vu à la télé mais veut désormais s'imaginer à la place du dresseur et agir. Les concours, aussi, sont intéressant : son ami Kyle lui a déjà dit qu'il était sacrément imaginatif et, s'il ne se voit pas manier la plume ou le pinceau de sitôt, l'idée d'être le précurseur d'un nouvel art attise son intérêt. Puis il y a aussi les questions existentielles telles que d'où viennent les Pokémon, pourquoi ils existent, comment fonctionnent-ils et pourquoi le monde est fait tel qu'il est qui lui traverse l'esprit. Pourrait-il rendre ce monde meilleur, à son échelle ? Bref, son cerveau de pré-adolescent est bien occupé !