Histoire

Durant son enfance, Cécil est Cécil-gueule-cassée. Quand tout va bien, il ressemble à une fille mais généralement, il fait peur à voir. Débraillé, couvert de poussière, de saleté et d'égratignures en tout genre, il est aisé de deviner que c'est un gosse à problèmes
Teigneux, belliqueux et caractériel, Cécil n'hésite pas à en venir aux mains s'il le faut. Ce gamin sait ce qu'il veut, et ce qu'il veut, c'est du respect ! Se moquer de lui, de son apparence ou de ses cheveux trop longs pour un garçon, c'est un non direct et un poing dans la gueule : malgré une apparence frêle, Cécil cogne là où ça fait mal.

Il ne sort malheureusement pas souvent vainqueur de ces affrontements avec les autres enfants et on lui fait remarquer que, peut être, puisqu'il ne gagne pas, il devrait considérer faire profil bas pour éviter de finir couvert de bleus. Que ça risque de tourner mal s'il s'entête.
C'est un refus catégoriquement : quitte à avoir la vie dure, autant rendre la pareille à ses tortionnaires !

C'est à la même époque qu'il rencontre Maush, un Opermine que ses bourreaux martyrisent. Cécil n'aime pas Opermine, Opermine est laid, a du mal à se déplacer et n'est pas très intelligent, mais Cécil aime encore moins le gros Dom, alors il lui fonce dans le gras pour le faire tomber. La chute leur fait du mal à tous les deux. Leurs parents respectifs sont épuisés, l'Opermine admiratif. Il suit Cécil qui se résigne à sa présence et le surnomme Maush parce qu'il est moche.
Mais la créature est douce et agréable à vivre. Avec les jours qui passent, Cécil se dit que le machin n'est pas si bête que ça. Pas si maladroit que ça... Toujours laid, mais pas si pire. Il s'y attache, décide que désormais, Maush aura beau être moche, ce sera son moche à lui.

D'autant que la présence d'un roc à ses côtés – dont il n'hésite pas à se servir pour se défendre – le rend horriblement arrogant, sûr de lui et plus dangereux. On l'embête de moins en moins.

A son adolescence, Cécil veut prouver qu'il est un vrai dur, qu'il peut avoir les cheveux longs et botter des culs (comme si qui que ce soit dans son quartier en doutait encore) et demande la permission de faire les arènes de Kalos. Ses parents hésitent, finissent par lui donner la permission : peut être les arènes canaliseront ses envies de se battre... Ou le feront redescendre sur terre, à ce stade, n'importe quelle solution leur conviendrait, vraiment.
Cécil n'est pas mauvais en combat de dresseur, mais il n'est pas excessivement doué non plus. Les combats d'arène lui plaisent, la défaite ne le mine pas tant que ça, mais quelque chose lui manque. Il décide de tenter sa chance dans les Concours.

Son père est dé-vas-té. Avoir un fils avec les cheveux longs ne lui plaisait pas trop de base mais au moins, grâce aux combats d'arène, il s'affirmait comme un vrai homme ! Les concours, en revanche  sont-.. une discipline féminine, une qui ravivera probablement de mauvais souvenir. Il tente de le raisonner, de le convaincre de renoncer, lui rappelle la dureté de son enfance à grand renfort de discours inspirés.
Cécil s'en moque bien : si on l'ennuie à nouveau, il cassera quelques nez et le tour sera joué, rien de plus simple !
Têtu, il se jette à corps perdu dans cette nouvelle discipline, vit sa meilleure vie d'imaginer des chorégraphies pour Maush. La tâche n'est pas aisée, l'Opermine n'a pas de jambes mais le premier concours les exalte.

Le retour à la réalité beaucoup moins.

Maush n'est pas jugé sur son talent, sa puissance ou ses capacités mais bien sur son apparence. Cécil est révolté. Pourquoi proposer des manches de démonstrations d'attaques si c'est pour le recaler uniquement parce que Maush est moche ? Autant simplement organiser des défilés de mode !
Cécil prend sa décision : il deviendra un super coordinateur uniquement avec des pokemons maudits. Et Maush sera le premier !
Les concours qui suivent sont-... Laborieux, mais les quelques rubans qu'il remporte sont éclatants. Pas assez nombreux pour lui ouvrir les portes du Grand Festival, mais assez pour qu'il se fasse remarquer : un coordinateur, un homme, qui ne participe qu'avec des abominations ? Du jamais vu. Des voix arguent qu'il déshonore la discipline. D'autres qu'il a tout compris à l'essence même des concours. L'orgueil de Cécil s'en délecte et il sait que sa voie se trouve là, quitte à échouer plus tard : il n'a peur de rien.

Sa carrière naissante est mise en pause deux ans, lors du service militaire. Cécil ne passe pas un bon moment. Les autres appelés sont cons mais ses supérieurs le sont d'autant plus. Avec son physique androgyne et sa grande gueule, Cécil se fait remarquer et pas en bien. Les corvées ingrates sont pour sa pomme, les punitions aussi lorsqu'il répond de trop ou qu'il se bat. En revanche, il garde un bon souvenir de la chute 'accidentelle' de son commandant. Rien de bien grave, assez pour l'envoyer au lit quelques mois. Cécil nie toute implication dans l'affaire.

Quand il ressort de son service militaire, son père le trouve métamorphosé avec joie : ses cheveux longs ont été rasé, il ressemblerait presque à un vrai homme, plus qu'à trouver un vrai métier et-... « Comment ça tu reprends les concours, fils ? »
L'illusion d'avoir un jour 'vrai' fils se brise. Par dépit, il tente de l'avertir qu'il va lui couper les vivres, mais les menaces sont creuses et Cécil trop têtu. Défait, son père lui offre son support à contre-coeur : « Tu as intérêt à leur offrir le même traitement qu'à celui du petit Dom.. » lui soupire-t-il.
Le jeune coordinateur sent une étrange chaleur lui étreindre la poitrine : il sait bien qu'il déçoit son paternel, mais il a une chance de le rendre fier et se promet de la saisir.

La représentation qui le propulse sur le devant de la scène médiatique de Kalos est celle où il met en scène la mort de son Rattata d'Alola. « Choqués ? Il se passe pourtant pire pour ces créatures à Alola. » La représentation ne lui obtient pas de passer en final mais attire l'attention de la presse et Cécil fait parler de lui.
Pas forcément en bien.

N'a-t-il pas l'air d'un déviant ? D'un rebelle anti-conformiste ? D'un mauvais exemple pour la jeunesse ?
Mais aucune presse n'est entièrement mauvaise et son discours qui rappelle que la beauté est différente pour chaque pokemon plaît à certains.
Cécil rentre alors dans son âge d'or des concours. Entre défaites humiliantes et victoires miraculeuses, il se fait enfin un nom de coordinateur. Un coordinateur anti-conformiste, mais au moins n'est-il plus considéré comme une erreur dans le décor.

Plus trop tout du moins.

C'est à cette époque qu'il fait la connaissance de Juliette. Juliette est jolie, Juliette a du caractère, comme Cécil et il l'aime bien. La courtise même. La relation oscille entre idylle et chaos. Cécil est amoureux, ne voit que le bon côté des choses. Trop peut être. Ils ne se disputent pas, ils sont passionnés. Il ne la néglige pas, il lui offre des cadeaux pour lui prouver qu'il pense à elle !
Mais il l'oublie, et il oublie qu'il l'oublie. Les rendez-vous passent au second plan dans son esprit, il a tant à faire, Juliette peut bien comprendre ça, elle n'a qu'à l'attendre, il lui reviendra bien assez vite. Et en attendant, il lui offre bijoux, fleurs et peluches. « Amour, ne fait pas cette tête, je te promets, tu es toujours dans mon cœur ! » ; « Coeur, tu ne quittes pas mes pensées, promis, ce week-end, je t'emmène à la mer. »
Mais la mer n'est jamais visitée. Juliette le lui a bien dit. Plusieurs fois même ! Que les colliers ont beau briller, une histoire ne se bâtit pas uniquement sur des présents mais sur la présence des deux amants, Cécil pense qu'elle exagère. Lui explique avec patience qu'il l'aime, la rassure sur sa dévotion, lui assure qu'ils auront le temps de rattraper les moments perdus. Le temps de voir la mer ensemble.

Ils ne l'ont pas.

Au terme d'une défaite humiliante, Cécil rentre brisé et étourdi. Allume la lumière, appelle sa Juliette. 'J'ai perdu...' annonce-t-il d'une voix cassée. La défaite ne lui fait pas peur mais pèse sur le moral. C'est qu'il aimerait bien un câlin, quelques mots de réconforts et d'assurance que cette défaite là ne le caractérise pas plus que les autres. Qu'il peut toujours se relever, continuer.
Trouver refuge dans les bras de sa compagne est tout ce qui l'intéresse à cet instant, mais c'est à un silence glacial qu'il se heurte. « Juliette ? Mon Amour ? »

Sur la table, avec son dernier présent pour l'élu de son cœur, il trouve une lettre. Une lettre qui l'achève, lui renvoie au visage des mois de négligence et d'arrogance.

Cécil se fige, se glace et se brise. La colère qui caractérisait jusque là toutes ses réactions l'abandonne soudainement pour laisser place à un sentiment plus dévastateur : voilà une défaite à laquelle il ne s'attendait pas.

Voilà une perte qu'il ne peut annuler d'une ingénieuse pirouette.

Ce soir là, Cécil pleure pour la première fois depuis des années. Désireux de profiter de son malheur, il se noie dans l'alcool, se roule sous la table de la cuisine et se laisse aller à une crise de larmes qui le secoue de longues heures au terme desquelles il finit par vomir avant de s'endormir.

Pathétique, mais quitte à être malheureux, autant être misérable.

La suite n'est pas glorieuse : son orgueil l'empêche de se laisser aller totalement mais il ne fait que très mal illusion. Le sommeil et l'appétit lui manque et pour combler le vide de son être, il s'enferme dans son rôle de coordinateur. Il accuse la rupture tant bien que mal mais cette obsession renouvelée finit par lui ouvrir les portes du Grand Festival

Un mal pour un bien, pense-t-il amèrement. Une réussite qu'il aurait voulu partager avec son amante. Amante à laquelle il en veut désormais de l'avoir abandonné de la sorte. Elle aurait pu lui en parler. Lui en parler 'plus' qu'elle ne l'avait déjà fait. Ne tenait-elle pas à lui ? Cécil tente de se persuader, il est moins douloureux d'être en colère que d'être triste.
Il n'y arrive pas, elle lui manque pour de vrai, il déteste ça.

Il aimerait lui parler, encore une fois. Se promet de le faire à la fin du Grand Festival, la fait passer en deuxième encore une fois sans s'en rendre compte.

La compétition est différente des concours qu'il a déjà livré. Plus exaltante, plus étourdissante aussi. Cécil a souvent envie de vomir mais c'est normal, c'est le stress et la pression : la défaite ne lui a jamais fait peur, sauf aujourd'hui.
Il est arrivé si loin, ça le tuerait d'échouer si prêt du but.

Il aimerait au moins arriver en final.
S'effondre au milieu de la deuxième manche.


Lorsqu'il se réveille, ses parents à son chevet, la nouvelle tombe comme un couperet. Ils sont dévastés de voir leur fils en si mauvais état, affamé et épuisé par une passion qui lui a déjà tant pris. Cécil, lui, est dévasté d'apprendre sa disqualification.

Alors qu'il entend les reproches baignés d'inquiétude de sa mère de ne pas prendre plus soin de lui, le vide se fait dans son esprit. Les voix tremblantes de ses géniteurs se fonde dans un sifflement strident qui remplace peu à peu tous les autres sons existants. Seul le battement de son cœur raisonne encore dans son esprit. Ca, et son amère défaite.
Et cette fois-ci, il n'y a aucune bouée de sauvetage à laquelle se raccrocher. Aucune colère pour avoir envie de se battre, aucun orgueil pour garder la tête hors de l'eau, aucune crise de larmes pour expulser son mal-être.

Cécil reste silencieux, abattu.

Il finit par accéder à la demande de sa mère de rentrer chez eux après un court séjour à l'hôpital. Sa faiblesse ne le quitte plus vraiment malgré ses faux semblants et s'impose à lui. Cécil se sent patraque, faible, incapable de reprendre sa vie d'avant et la bienveillance de ses parents est vaine.
Leurs mots d'amour et de soutien sont déformés par un filtre vicieux dans l'esprit du coordinateur et tout ce qu'il entend se change en pitié. Il a échoué dans son projet, échoué à les rendre fier mais ce n'est pas grave : il n'a qu'à retourner dans les jupes de sa mère après tout.

Ca le rend furieux.

Et cette soudaine colère, se réveillant après des semaines de léthargie le rassure. Quelques chose lui revient, de l'aigreur, certes, mais de l'aigreur capable de rendre le vide en lui plus aussi vide !

C'est un signe à ses yeux. Ne se sentant pas prêt de ré-affronter directement les concours et les caméras de Kalos, Cécil décide qu'il est tout de même temps pour lui de reprendre les rennes de sa vie en mains.
Sans perdre de vue l'objectif du Grand Festival – ses rivaux ont eu de la chance qu'il soit tombé malade mais il ne leur refera pas cette fleur – le coordinateur décide de voyager. Pas très loin de sa terre natale – mais pas à Galar, ew – Keros s'impose comme une évidence après avoir vu une affichette d'office de tourisme.

Son Kerosien est peut être cassé, mais c'est la seule autre langue qu'il sait parler raisonnablement – outre quelques insultes fleuries d'autres dialectes –. Fort de cette décision et accompagné de Maush, le voyage débute alors qu'une voix insidieuse n'a de cesse de lui murmurer à l'oreille « Hé vieux... Tu te sens toujours un peu étourdi, n'est ce pas ? »

… Il sera toujours temps de s'en inquiéter plus tard !