Guy Ness

Histoire

The Pub’lisher, établissement dont le nom est digne de la créativité d’un coiffeur, ancien bar fréquenté par des poètes mal aimés des maisons d’édition. Un comble dont le propriétaire s’est toujours amusé. Du moins l’ancien propriétaire, Ness père.

Monsieur Ness c’est un beauf.

Il n’a pas toujours été comme ça mais quand son pub est devenu un peu plus populaire, il s’est vite intégré à sa nouvelle clientèle. Puis sa femme l’ignorait, il n’avait pas d’autre passe-temps que le billard et les fléchettes alors le bar ? Il était quasiment toujours ouvert. Monsieur Ness il a tout de même réussi à avoir deux enfants, une fille Blair et un fils, Guy, nommé ainsi après avoir perdu un pari avec l’un des habitués. Un peu con d’avoir joué le prénom de son fils sur une course de Galopa, ça sonne mal et il aurait pu, il ne sait pas, lui donner le nom de son propre père ? Ou une connerie comme ça.

Monsieur Ness s’en fout en vrai.

Guy n’est pas un gamin dont on s’occupe beaucoup. Maman elle préfère sa grande-sœur qui est son portrait craché. Elles font de la cuisine, de la couture, commèrent et rêvent à mieux tandis que le petit garçon est laissé seul. Il ne plaît que lorsqu’il se tait alors il apprend doucement à s’effacer pour être toléré. Papa ? Il ne s’y intéresse que vers six ans, « c’trop fragile avant ! » qu’il s’est justifié. Ils rattrapent le temps perdu aussi bien qu’ils le peuvent. Son père tente des trucs comme un week-end de pêche où Guy fini emporté par sa prise dans l’eau et ne voudra plus tenir une canne à pêche « de toute sa vie » qu’il a dit.

Alors ils finissent au pub.

C’est pas un endroit pour un gamin mais c’est le fils du patron. Puis il dit rien, reste assis à siroter son diabolo. Il écoute les déboires des alcoolos du coin, leur tapote le dos à défaut d’atteindre l’épaule. Beaucoup n’ont pas d’enfant alors le fils Ness c’est un peu le leur. On lui donne des bonbons, de l’argent pour qu’il aille acheter du tabac en le laissant garder la monnaie. Ces petites pièces il les met soigneusement de côté au cas où, les histoires des clients qui ont tout perdu le tracasse, il craint que ça ne lui arrive un jour.

L’école c’est pas trop ça. Enfant de commerçant il sait compter mais ça s’arrête là. Le reste ça ne l’intéresse pas trop. Il aime les mythes et légendes car c’est cool et les poèmes courts qu’il récite au Pub’lisher. Certains gosses se moquent de son nom, ça sonne un peu pédalerie, c’est rigolo. Sauf que lui il fait deux têtes de plus que ces marmots et il n’hésite pas à se battre. Quand son père est convoqué, il n’est pas plus concerné que ça, propose d’inscrire Guy à un sport pour le défouler. Alors son fils commence le rugby, ça lui plaît et ça change. Il a des coéquipiers, il est dans une équipe !

Guy grandit sans prise de tête, il a bien compris qu’il n’irait pas loin dans les études et que sa seule porte de sortie s’il ne veut pas finir comme son père c’est le rugby. Il est bien parti pour avoir une carrière là-dedans ! Maman l’ignore toujours, sa sœur ne lui adresse la parole que quand elle a besoin de quelque chose mais ce n’est pas grave, il s’est trouvé une autre famille. Une aussi beauf que son père, où fin du lycée il aura ses premières expériences avec le même sexe car.. Les douches collectives et le savon qui glisse un peu trop facilement. Tout ça, tout ça.

Mais il est bien.

C’est sa seule motivation pour maintenir une moyenne correcte ( passable ) d’avoir intégré l’équipe de son école. Il vit, respire rugby. Le pub c’est toujours un peu son QG, c’est là où il révise et se fait de l’argent de poche en donnant un coup de main lorsqu’il n’a pas entraînement. Ness père est un peu déçu de voir que son fils ne veut pas reprendre l’établissement mais il s’y fait, après tout, ce n’est pas le genre d’homme à trop s’apitoyer. Il encourage son gamin autant qu’il peut, lui comme les ivrognes du coin qui sont les premiers à prendre place dans les gradins.

Tout semble tracé, l’univers a l’air d’être de son côté et ça, jusqu’au dernier match de la saison. Il est alors âgé de dix-huit ans. La victoire a été écrasante au grand malheur des supporters adverses surtout d’un qui avait parié toutes ses économies sur un résultat inverse. Guy ne se souvient plus à quel moment l’homme et son pokémon s’en sont pris à lui. En sortant des douches ? En allant chercher son sac ? Reste qu’il était seul et c’est parce qu’il mettait trop de temps à rejoindre les autres qu’ils se sont inquiétés et l’ont cherché. Ils l’ont retrouvé au sol, la jambe droite dans un état indescriptible.

Pris en charge, Guy n’a pas perdu sa jambe. C’était là sa plus grande crainte et il pensait que, puisque le pire ne s’était pas produit, un peu de repos et de rééducation suffirait à reprendre. Mais il n’a jamais vraiment réussi à s’en remettre et, devenu boiteux, a dû abandonner son rêve.

Wouhou.

S’en suit une petite baisse de morale, logique, le Guy il n’avait pas prévu ça, c’est un peu contrariant, ça nique ses plans de vie. Alors bon, il déprime mais pas longtemps ! Il se dit même que c’est un peu drôle, Arkée a vachement d’humour. Au fond ça lui fait plus de peine que ça mais c’est l’époque où on ignore ses émotions de façon absolument très saine !

Il fait le fier mais il abandonne tout.

Guy ne cherche pas à trouver quelque chose qui lui plairait plus que barman, il n’en n’a pas la force, n’a pas envie de voir un nouvel espoir partir en fumée. Ness père et les ivrognes sont bien contents de le retrouver à plein temps et bon, c’est pas la mort comme endroit. Ça mérite un bon coup de neuf et c’est ce qu’il fera à 30ans quand la gestion de l’établissement lui sera accordé. Son petit pot d’économies en cas de coup dur sera enfin vidé pour les travaux, à quoi ça sert d’amasser du pognon si c’est pour crever demain ?

Vous pouvez donc retrouver Monsieur Guy Ness au Pub’lisher en bordure de Tartan. Le pub a été rénové avec une petite scénette pour les artistes histoire d’honorer son nom et d’attirer une nouvelle clientèle. Mais attention, il n’y a que l’endroit qui est bichonné, Guy ne vous graciera pas d’une allure soignée. Monsieur a bien du mal à se passer un coup de peigne et il repousse tellement son rendez-vous chez le coiffeur que ses cheveux bruns qu’il portait courts ont poussé en mulet. Ses yeux marrons sont complètements cernés, il a une barbe de trois jours dont il doit toujours s’occuper et sent le tabac à plein nez. D'ailleurs son nez ! Parlons en : il dévie légèrement et est cabossé suite à des matchs de rugby et lui donne un air de bagarreur, lui qui peine à dégager les gens de son pub.

S’il ne peut plus pratiquer le sport qu’il a tant aimé, il continue la musculation. C’est le seul truc d’un peu sain dans sa vie. La natation soulage ses vieilles articulations mais c’est la croix et la bannière pour l’y emmener, il n’a jamais été très bon nageur. En tout cas il se maintient un peu même si le plus gros de sa carrure reste un vestige de toute ses années à jouer.

Pour ce qui est des tenues, toujours une chemise, parfois un veston pour changer des vestes, un pantalon de costume ou bien un kilt. C’est qu’il est kérosien et fier. N’allez pas lui demander ce qu’il porte en-dessous, il en a marre de lever la jambe pour montrer. Avec ça des chaussettes hautes en laine sont de paires et des mocassins car monsieur aime avoir un minimum de confort, pas prise de tête.