Cecchini Louis

Histoire

Carmonte, c'est cette minuscule région en plein essor, non loin de Kalos : un décor de carte postale, d'immenses hôtels et autres établissement de luxe, il suffit de voir le type de bateau s'arrêtant au port pour réaliser que la population est majoritairement composée de touristes fortunés, en quête des nombreux amusements que le Rocher leur propose. Pour un jeune ayant vu le jour ici ? On a vite fait le tour des 2km2, les travaux constants rivalisent en décibels avec les moteurs de ferry et on peut compter sur les doigts des mains les camarades de son âge. Du haut de la tour dont sa famille a acquit la propriété (le départ de ce qu'ils espèrent être une fructueuse entreprise), Louis n'a jamais trouvé d'attrait à ce paysage pourtant idéal.

Après tout, rien de ce qui baigne dans la lumière ne lui appartiendra : contrairement à ses parents ou son ainée, il n'a pas cet esprit d'entrepreneur le poussant à désirer voir son influence ou son compte en banque croître. Ne pas être considéré comme nécessaire au futur de l'entreprise familial est un soulagement à ses yeux, on est toujours parti du principe qu'il trouvera bien une façon de se rendre utile, un de ces jours, et cela se concrétisera dans ce petit séjour à Keros. Le jeune homme n'a pas hésiter longtemps lorsqu'on lui a fait part du désir de s'exporter à l'étranger, prenant en charge cet établissement de jeu. L'occasion d'obtenir sur le tas les qualifications manquantes d'une éducation qu'il commençait à négliger.

A en croire le miroir, ce n'est pas la seule chose qu'il a négligée par ailleurs : ses cheveux sont bien trop longs, retrouver une frange nette entre ses mèches argenté et lavande lui ayant demander bien des efforts. Louis a abandonné un moment les cols de cravate bien droit au profit de col roulés. Puis, le plus grave, il a une gueule d'enterrement : mais il est le seul à voir le gris morne dans ses iris que les autres ont tendance à trouver colorées, alors peut-être que sa piètre tentative de garder la face les trompe également. La garde-robe qu'il a apportée est la seule chose auquel il ait prêté attention, comme si cela rattraperait le reste... Enfin, qu'importe ? Il sait très bien qu'il risque de traiter avec la pègre plus régulièrement qu'avec la haute société.

Louis est naïf sur bien des points : la pauvreté, l'insécurité, ce n'est pas quelque chose qu'il a pu constater directement aussi a t-il tendance à penser la vie bien plus facile qu'elle ne l'est réellement pour les "prolo" qu'il prend de haut. Le pied qu'il a dans le monde de la nuit, ce n'est pas celui d'un joueur mais celui de la "maison", avec l'assurance de voir tout les pièces circulant finir dans sa poche d'une manière ou d'une autre : alors il a toujours fait preuve de légèreté, que ce soit avec ses clients fortunés ou les quelques désespérés espérant que "cette fois, c'est la bonne". Il comprend théoriquement ce qui les amène ici mais émotionnellement ? Il s'en détache, ne s'attache pas à la personne. Il en va de même avec ses partenaires commerciaux.

L'entreprise doit être en bons termes avec les Sealg, afin de s'assurer leur protection et leurs services : en échange, on leur cède une part du gâteau, ainsi qu'un membre assez important de l'entreprise en gage de bonne foi... En vérité, Louis a bien conscience de n'être qu'un pion sacrifiable pour une famille ne pouvant pas encore se permettre le risque d'un scandale. Si ce n'est que lui qui tombe, rien ne changera, car il vaut moins qu'un rouage dans le système. Ce n'est finalement pas étonnant que le jeune homme noie sa déprime en décortiquant les autres. Une arrogance qui déplait, à Keros, mais qu'importe ! Il s'assure de payer grassement ses livreurs, ne voulant pas se mettre de braconnier à dos, mais ne craint pas le reste de la populace.

Louis se sent terriblement seul, voilà tout. Il n'a jamais eu qu'un ami proche, le fils de leur concierge à Carmonte : l'écart de classe entre eux se faisait de plus en plus sentir, mais le garçon pensait que cela n'avait aucune raison de briser leur relation. Il ignorait que chaque remarque ignorante, chaque invitation auquel son camarade ne pourrait réalistiquement accéder ou proposition d'aide motivées par la pitié n'étaient que de violents coup de poignard. Lorsqu'il réalisa ses torts, une barrière s'était déjà établie entre eux, trop haute pour que des excuses ne l'atteigne. Et lorsqu'il a voulu se confier à ses parents, on lui a juste répondu que c'était normal. Le succès fait des jaloux et les places au sommet sont bien solitaires.

Il ne peut s'empêcher de craindre, depuis, que chaque tentative de rapprochement n'est motivée que par l'appât du gain. Il en vient à préférer être haï car au moins il sait que l'attention lui étant portée est sincère, non pas calculée. Oh, il aime sa famille sincèrement, mais il a bien vu les dynamiques évoluer depuis qu'il est devenu un adulte : papa et maman n'ont aucune envie que leur oisillon reste dans le nid, c'est pour eux une preuve d'amour que de regarder depuis leur perchoir jusqu'où il ira- même avec une aile blessée. Sa soeur prend des nouvelles de temps en temps, mais est beaucoup plus impliquée dans son travail et il ne peut s'empêcher de l'envier, se comparer à elle. S'il était comme elle, peut-être serait t-il digne d'affection...