It's my problem that i never am happy

Il était tout bonnement hors de question que cet œuf éclose des les sous-sols du manoir, le petit bébé qui était dedans naîtrait avec une santé fragile et Fenris refusait tout bonnement de le laisser entre les sales pattes des connards au service du 'Don'. Même si il allait se faire taper sur les doigts, il ne céderait pas. C'est pour cela qu'il avançait à pas de Lougaroc en regardant de temps en temps à gauche à droite pour vérifier que personne ne l'ai vu sortir de 'la porte interdite', là où les enfants n'étaient pas censés aller. Fenris ne comprenait pas vraiment pourquoi d'ailleurs, il avait vu mille fois pire que de pauvres pokémons en cages. Et la rumeur était vraie, ils étaient bien traités chez les Cornwall à l'inverse de l'autre vieux De Montgomery.

Pour l'instant, c'était Courage qui l'aidait à se frailler un chemin en douce vers sa chambre. De là, il pourrait cacher l’œuf dans un placard ou quelque chose du genre. Les esprits racontaient que l’œuf éclorait bientôt de toute façon. Mais le jeune homme n'avait pas demandé à ces derniers ce que contenait l’œuf en question. À vrai dire, il s'en fichait, il savait juste que l'aura à l'intérieur de l’œuf était fragile, faible et trop douce pour l'univers pour lequel il était destiné. Walpurgis faisait des gros yeux à Fenris pour lui faire comprendre qu'elle était vraiment fâchée mais n'intervint pas spécialement. Au fond, la quête du jeune garçon avait quelque chose de noble. Même si il aurait été furieux qu'on le lui dise.

Il ne savait pas vraiment pourquoi était en train de faire ça, il voulait juste que ce petit pokémon grandisse tranquillement. À l'abri de la violence extérieur, une paix auquel Fenris n'avait pas eut droit. Lui qui s'était laissé aller dans la passivité en voyant tant de faibles souffrir face à lui, il se mettait soudain à sauver... Ou plutôt voler un œuf de pokémon pour l'extirper des mains des sbires Sealg qui seraient tout sauf tendres avec lui. Et il se sentait horriblement stupide d'agir comme tel. Mais bon, ils avaient déjà atteint le second étage et sa chambre n'était plus très loin. Plongé dans ses pensée, ce ne fut que trop tard que Fenris entendit l'avertissement de Courage. Voilà qu'il faisait face à la jeune femme aux cheveux blancs.

L'ancienne fille du vieux De Montgomery, pour tout ce qu'il savait d'elle. La mère des deux petits bébés aussi. Il recula en arrière en la voyant, serrant l'oeuf contre lui comme si il avait peur qu'elle lui arrache des bras. Il avait l'air d'un petit Rocabot acculé par des pokémons féroces, aboyant pour essayer de faire peur mais étant lui-même terrorisé. Ses yeux perçants ne trompaient personne : il était mort de trouille. Pourquoi fallait-il qu'il tombe sur elle en particulier, elle était gentille et ne lui avait jamais causé d'ennuis ! Mais cela n'allait pas durer, il était presque sûr que la jeune femme lui demanderait de reposer l’œuf là où il l'avait trouvé.

Mam'zelle Emilico avait beau être gentille, elle ne lui ferait pas changer d'avis.

Ce...Cet œuf est à moi. Dit-il d'une voix moins assurée qu'il ne l'aurait voulu. Vous me le reprendrez pas ! Le bébé qui est dedans est trop faible, les mecs de la team en voudront pas de toute façon. Alors laissez-moi tranquille !

Il n'avait rien de crédible avec sa voix tremblante et sa posture de Rocabot apeuré. Il ne tremblait pas parce qu'il avait peur d'Emilico en particulier mais parce qu'il s'imaginait qu'un seul claquement de doigt de la part de la jeune femme pouvait signer son arrêt de mort. Et il s'imaginait avoir fait une grosse, très grosse bêtise.  

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Elle ne semblait pas mentir, Courage et Walpurgis lui auraient dit si elle mentait. Mais elle se tenait là, souriante, proposant juste de mettre l’œuf au chaud. Il cligna des yeux, bouche-bée et incapable de réagir pendant quelques secondes. Puis il se détendit lentement, et après un long silence, sa voix, un peu hésitante, se fit à nouveau entendre.

Vous... Vous voulez vraiment pas que je le ramène ? Pour de vrai ? Il était encore incrédule et après un nouveau long silence, il baissa les yeux, fixant son œuf et murmura quelque chose qui lui arracha presque les lèvres. Merci... Vous êtes gentille... Pour une adulte.

Il la suivit sans faire plus d'histoires. Les yeux toujours rivés sur l’œuf qu'il avait dérobé. Il pouvait sentir les petits battements de cœur du pokémon chétif à travers la coquille, son aura était toute faible et tremblante. Il esquissa une grimace, il devait encore poser une question à Mam'zelle Emilico et ça lui était très pénible de devoir s'en remettre à un adulte. Mais ce n'est pas comme si il avait le choix.

Vous êtes médecin, pas vrai ? C'est... C'est ce que m'a dit Aurora. Alors, si le pokémon va pas bien quand il sortira de l’œuf, vous pourrez l'aider ? Je sens que c'est pour bientôt.

Il n'en dit pas plus, si Aurora avait parlé de lui à Mam'zelle Emilico, elle devait avoir mentionner ses pouvoirs aussi. Dans tous les cas, il fut prit par surprise quand la première fissure apparut sur la coquille de l’œuf dans un craquement pénible. Le petit bébé tentait de toutes ses forces de percer la coquille mais Fenris sentait que c'était mal parti, le petit n'avait pas les forces de se libérer par lui-même, il faudrait l'aider, et ils n'avaient pas beaucoup de temps pour ça. C'est pour ça que le garçon s'élança en avant, devançant la jeune femme et ouvrit la première porte à sa portée : une chambre d'invité. Il s'empressa de tirer les draps du lit pour créer un petit nid de tissus pour son œuf. Puis il jeta un regard insistant vers l'adulte.

Je crois qu'il y arrivera pas tout seul ! Qu'est-ce qu'on peut faire pour l'aider sans le blesser ?

Fenris n'avait pas beaucoup de connaissances pour prendre soin des pokémons, plutôt l'inverse même. Il ne savait pas si il était bon pour le pokémon d'ouvrir sa coquille ni si le laisser faire malgré sa faiblesse était une bonne idée. Surtout que le petit bébé commençait à paniquer à l'intérieur. Et Fenris paniquait de concert. Tout ce qu'il pouvait faire, c'est de regarder Mam'zelle Emilico d'un air suppliant, espérant que contrairement à tous les adultes qu'il avait connu jusqu'à là, elle se montrerait aussi gentille qu'elle prétendait l'être.

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Mam'zelle Emilico avait raison, c'était risqué de tenter d'ouvrir l'oeuf. Pourtant, l'adolescent mourrait d'envie, ou plutôt ressentait le besoin urgent de le faire. Le petit bébé à l'intérieur de l'oeuf était tout paniqué et son petit cœur trop faible battait beaucoup trop vite. Il aurait aimé pouvoir lui chanter une berceuse pour le calmer, mais il n'en connaissait aucune, personne n'en avait chanté pour lui donc bon... Comment se montrer tendre et encourageant envers un bébé pokémon quand on ne sait même pas faire avec un bébé humain – ou avec soi-même ?

Ses yeux étaient maintenant fixés sur l’œuf, si bien qu'il sursauta quand un Feunard chromatique vint le bousculer légèrement pour s'enrouler autour. Le garçon se serait débattu avec le renard si Mam'zelle Emilico avait pas précisé que c'était pour aider. Elle a raison, le bébé ressent la chaleur et se calme, il se repose, reprends quelques forces et revient à l'assaut. Seconde fissure. Ça va être très long mais Fenris va se montrer patient.

Il sait que ce n'est pas un petit spectre qui se trouve sous cette coquille mais il ferme tout de même les yeux pour envoyer toute la tendresse du monde à travers l'épaisse coquille. Ça semble marcher puisque le petit pokémon frappe un peu plus fort et réussit à arracher un morceau de coquille. Ce qui laisse apparaître furtivement une fourrure argentée. Si Fenris se voyait, il se trouverait ridicule, car son sourire est celui d'un enfant.

Le bébé à l'intérieur va sortir, il n'y a plus aucun doute à avoir maintenant.

Ça semble prendre un temps infini, mais la petite bête finit pas réussir à se frailler un chemin hors de son œuf. Dès que la boule de poils sort de son « antre », le Feunard s'applique à lui faire une rapide toilette. Rapide car malgré la chaleur agréable qu'il dégage, c'est vers l'aura pleine de tendresse de Fenris que le petit bébé se précipite. Le voilà qui se colle contre l'adolescent pour partager sa chaleur corporelle. C'est un bébé Evoli avec les oreilles tombantes un peu bizarres, chromatique qui plus est. Fenris commence à comprendre pourquoi il se trouvait chez les Sealg.

Mais ses pouvoirs n'avaient pas menti, le bébé tremblait comme une feuille et même si il était sorti de son œuf, il ne semblait pas tiré d'affaire. Enfin, « elle », car en regardant sa petit queue tremblante, Fenris vit une forme de cœur typique des Evoli femelles. Il la serra doucement contre lui et la berça comme un bébé, comme il avait vu faire Peggy avec les jumeaux. Pas un geste qu'il avait apprit de lui-même mais il imaginait que ça marchait.

Le jeune hésite un instant mais finit par se tourner vers son ainée.

Elle est encore toute faible, il y aurait pas un moyen de la requinquer un peu ?

Oh bien sûr, il avait songé à la replacer dans la fourrure chaude du Feunard, mais le bébé ne voulait tout simplement pas quitter ses bras. Ce qui n'empêcha pas ce fameux Feunard – Suzy, il croyait – de donner quelques coups de langue au pelage ébouriffé du petit renardeau. Pancake, qui jusque là s'était tenu tranquille sur l'épaule de son dresseur, finit lui-aussi par descendre prudemment pour masser doucement le bébé. Tommy, moins assuré, regardait faire de loin. Walpurgis se tenait à distance raisonnable mais regardait son « fils » d'un air attendrit tandis que Courage regardait timidement le spectacle derrière Mam'zelle Emilico. Semblerait-il que toute la petite équipe avait déjà accepté l'Evoli comme l'une des leurs.

Si il n'était pas profondément anti-religieux au point d'avoir envie de brûler des églises de temps à autre, Fenris aurait sans doute fait le rapprochement entre cette scène saugrenue et la naissance d'Arkée au sein de son étable avec le Tiboudet et le l'Ecrémeuh. Ce qui était drôle car Breith n'était pas loin. Mais si on avait fait remarqué la chose au garçon, il aurait sans doute gueulé que ça n'avait rien à voir. Que Arkée était une connerie d'adulte et que ce qui se passait en ce moment était mille fois plus important.

Quelques minutes plus tard et la petite Evoli, toute, vraiment toute petite, poussait son premier piaillement. Fenris su alors que le danger était écarté.

Elle va vivre, Mam'zelle Emilico ! S'exclama-t-il sans s'apercevoir des larmes qui menaçaient de couler le long de ses joues. Suzy l'a sauvée ! Merci !

C'est tout ce qu'il trouvait à dire, il n'avait pas vraiment l'habitude de remercier un adulte... Ou qui que ce soit d'ailleurs. Mais il fallait avouer que si il n'avait pas le petit bébé dans ses bras, il serait aller faire une grande accolade à la jeune femme, bouleversé comme il était.

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Il faut encore quelques temps à Fenris pour se calmer. Il renifle, devrait se sentir stupide, sans doute, mais il s'en fiche pour le moment. La petite est hors de danger et c'est tout ce qui compte, il peut se permettre d'écouter Emilico. Il grimace un instant, un court instant. « Maman » n'est pas vraiment le terme qu'il voudrait entendre mais c'est vrai que le mot « Papa » n'a pour lui et pour Mademoiselle Emilico, aucune trace de tendresse.

Puis vient le choix du nom, Fenris reste muet tout en regardant la petite Evoli au poil argenté se frotter contre lui et piailler. Comment veut-il l'appeler ? Il n'en a aucune idée. Oh, il y a bien une idée mais...

Je sais pas comment s'appelait ma mère, mon connard de paternel a jamais voulu me le dire. Sinon je lui aurait donné ce nom... Je sais que c'est bizarre mais comme ça, elle serait un peu... Revenue avec moi. Murmure-t-il en baissant la tête, aussi gêné que soulagé de se confier sur son passé chaotique.

Il est interrompu dans ses pensées par les piaillements de l'Evoli qui se débat un peu, une simple lecture d'aura lui apprends qu'elle a faim. Mais qu'est-ce que mange les bébés exactement ? Il jette un coup d’œil à l’œuf brisé et aux coquilles éparpillées sur le lit défait. Bah, ça n'a pas d'importance, le Don a des domestiques, non ? Pas beaucoup, certes, mais au moins un ou deux pour faire le ménage. C'est leur problème, pas le sien maintenant. Il a plus important à faire. Il se lève avec précaution pour ne pas bousculer le petit bébé encore tremblant et se dirige vers la jeune femme.

Mam'zelle Emilico, ça mange quoi un bébé pokémon ? Demande-t-il un peu embarrassé par sa propre ignorance sur le sujet.

Il faut maintenant se diriger vers les cuisines. Avec Mademoiselle Emilico à ses cotés, il n'aura pas trop de problème pour y accéder. Il faut préparer à manger à ce petit bout de chou et c'est tout ce qui compte pour lui pour l'instant. Sur le chemin, une question lui picote les lèvres tout en regardant Suzy faire sa trotte pour ouvrir la marche. Il n'ose pas trop regarder Mademoiselle Emilico, ne sachant pas trop pourquoi.

L'Evoli, quand à elle, essaye de se glisser sous sa veste pour avoir plus de chaleur. Il fait de son mieux pour l'envelopper avec et la serrer bien fort sans lui faire mal pour autant. Il peut mieux sentir son souffle et ses battement de cœur, ainsi que son aura apaisée ou ne demeure que la faim juvénile. Après être sorti du couloir des chambres d'invités, Fenris s'arrête net. La question le démange trop, tant pis si il se fait jeter comme une peau de Nanab.

Mam'zelle Emilico, vous pouvez m'apprendre à soigner les pokémons comme vous ? Enfin, je veux dire... J'aimerais pouvoir les soigner moi-aussi. J'ai passé toute ma vie à les chasser et... J'aimerais bien me racheter.

Pourquoi ? Il ne sait pas trop. Depuis qu'il est ici, il a prit goût à s'occuper des pokémons, à prendre soin d'eux. Il a découvert qu'il préférait sauver des vies plutôt que les prendre. Quelque part, il ne peut pas mentir à ce sujet, entrer dans la famille Cornwall l'a changé. Mais il préfère se dire que c'est grâce à Aurora plutôt qu'à la patience et l'attention de ses parents adoptifs. Il n'aime pas devoir quelque chose aux adultes de toute façon.

Et Mademoiselle Emilico ? Qui est-elle pour lui ? Une deuxième mère adoptive ? Il la regarde un instant, un peu perdu. Elle est douce et gentille, patiente aussi, c'est l'image qu'il se faisait de sa mère. Mais peut-on vraiment demander à une jeune femme que l'on connait à peine d'être une mère de remplacement ?

Sur ça, il préfère ne pas se confier car il se trouve ridicule.