Luana de Montgomery

Histoire

Unique fille d'une branche secondaire des Montgomery, le petit trésor était tout ce que ses parents désiraient chez une fille. Une peau blanche et douce, des cheveux blonds, des yeux bleus, en somme l'héritière de la beauté maternelle. Tout l'inverse de ses deux grands frères à la tignasse sombre et hirsute. Les jumeaux terribles passaient leur temps à débattre sur qui était l'aîné - Gregory, à quelques minutes de différence, ce qui mettait Joël en rage. Là où les garçons étaient réquisitionnés par leur père, Luana ne voyait presque que sa mère. Une dame aux manières nobles, parfaite femme au foyer qui s'occupait des enfants, réalisait des travaux de couture, et était la maîtresse que jardin. Les tâches ménagères relayées aux employés du manoir familial. Autant dire que la matriarche Montgomery avait la main ferme à la maison, tout le monde marchait au pas avec elle, y compris les garçons. Sa voix faisait loi à l'intérieur. Luana reçut une éducation digne de toute jeune noble, littéraire, artistique, bienséance, elle apprit aux côtés de sa mère. Celle-ci tenait à élever personnellement sa fille pour en faire une dame aussi distinguée qu'elle. L'enfant dépassa rapidement ses camarades d'école - la petite avait fait un caprice pour être scolarisée comme n'importe qui. Elle voulait se faire des amis, en dehors du cercle de la noblesse. Ses tentatives ne furent jamais très fructueuses, les autres la voyaient comme une fille pourrie gâtée. Ils n'avaient peut-être pas tort.


-Luana, Rhéa, Margaret de Montgomery, veuillez descendre tout de suite !

Personne n'employait jamais son nom complet. Personne, sauf sa mère en colère. Il faut dire que la gamine devenait de plus en plus turbulente, à courir partout dans le manoir, ou grimper aux arbres. Les domestiques hurlaient souvent en la voyant revenir couverte de boue et d'égratignures. Luana s'ennuyait à jouer l'enfant modèle. Elle ne voulait pas être sage, ni délicate, ni une jolie princesse. Ce qui la faisait rêver, c'était de devenir ranger comme son père. Ou bien une grande dresseuse forte, libre. Que des activités pour les garçons en somme. Ses frères se moquaient de ses ambitions "irréalistes", ne manquant jamais de lui rappeler que eux, avaient le droit de faire tout ça si ils le voulaient. La fratrie s'est de nombreuses fois battue, sous les yeux horrifiés des employés du manoir.

-Tu resteras consignée dans ta chambre pour les jours à venir.

Être enfermée, Luana en a l'habitude depuis son enfance. C'était la punition préférée de sa mère, l'empêcher de sortir, la priver de liberté. Elle savais bien que sa fille détestait ça. On lui apportait le repas dans sa chambre, on excusait son absence à l'école sous prétexte de maladie. La dernière Montgomery passait pour une petite à la santé fragile, quelle ironie.

Quelle ironie que ça soit devenu vrai à force d'y croire.

Même cette forte tête dut se résoudre à se calmer un peu. Jeune adolescente de douze ans, lors d'une sortie scolaire, le professeur paniqua en voyant son élève en difficulté respiratoire. Incapable de retrouver son souffle comme bloqué. Une première crise qui marqua le début de longs passages à l'hôpital, de tous les examens possibles. Pour qu'au final aucun médecin n'ait de réelle réponse.


-Nous ignorons de quel mal souffre votre fille. Tout ce que nous pouvons faire c'est traiter les symptômes, et lui conseiller beaucoup de repos.

Du repos. Ses parents n'avaient plus que ce mot à la bouche. Repose toi, ne fais pas trop d'efforts. Elle avait l'impression d'être une handicapée nécessitant d'être sans cesse assistée. Un domestique l'accompagnait dans chacun de ses déplacements pour s'assurer que l'adolescente n'en faisait pas trop. Luana n'avait plus d'intimité, même aller son oncle et sa cousine requérait qu'on la surveille. On lui interdit la possession de pokemon, par crainte d'un accident. Sa mère craignait plus que tout de la perdre. Les seuls créatures autorisée dans son entourage étaient des pokemon spécialement dressés pour les thérapies. Calmes, reposants, aux attaques apaisantes. Il en passait plusieurs au manoir chaque jour. Plus que jamais, elle étouffait.

Hélas, sa majorité n'apporta nulle délivrance. Toujours aussi protectrice, sa mère la couvait comme un bébé, constamment inquiète de sa santé. Bien sûr, il y avait d'autres crises, d'autres moments où elle souffrait de ne plus respirer. Impossible de faire du sport, le moindre effort risquait de la faire chuter. Impossible de manger ce qu'elle voulait, les médecins débattaient autour de régimes adaptés. Elle avait l'âge de se marier, ses parents refusèrent toutes les propositions. Trop faible pour porter un enfant, trop faible pour une relation conjugale.

Une seule victoire finit par percer à force d'insistance. Puisque sa santé était la priorité, elle invoque cet argument pour déménager à Eideann. Ville a l'air sûrement plus pur qu'à Tartan, ça ne pouvait que favoriser sa convalescence. L'excuse fonctionna, à la condition d'avoir une domestique sur son dos. La jeune femme n'émit pas d'objection, aucune employée ne pouvait être aussi envahissante que ses parents.

Luana trouva un semblant de liberté là-bas.
Elle put enfin manger à sa guise.
Elle n'avait plus à supporter les jérémiades quotidiennes de sa mère.
Oh, oui, celle-ci envoyait des lettres, mais il lui suffisait d'en ignorer la moitié et répondre une fois par semaine.
Ce n'était pas idéal, juste respirable.

Sans sa maladie, la belle jeune femme serait probablement déjà mère à son tour, pour perpétuer une quelconque lignée noble. Qu'on ne se trompe pas, elle soutient fermement la royauté galarienne, cependant avec une grande pointe de féminisme. Elle rêve d'avoir une jolie coupe courte, mais se doit de garder une chevelure longue, comme toute dame de son rang. A défaut de suivre son souhait, elle expérimente de nombreuses coiffures extravagantes, qui hérisseraient le poil à sa mère.

Rêveuse et optimiste, Luana n'abandonne pas ce qu'elle considère sa voie. Le frisson des combats, la joie d'aider autrui, la liberté d'explorer le monde. Un jour oui, la tare sera plus forte et réussira à l'emporter. Tout le repos du monde ne la guérira pas, malgré les commentaires optimistes des médecins. La jeune femme n'est pas idiote, ils essaient juste d'arrondir les angles. Qu'ils aillent dans le monde distorsion avec Giratina.

Si un jour elle perd le combat, elle veut qu'on se souvienne d'elle pour ses exploits.
Pas pour sa lâcheté.